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L'Express
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La lettre politique de L’Express, 30 avril 2024
le Parti pris
Attal-Bardella: pourquoi le duel aura finalement lieu
par Eric Mandonnet
Rédacteur en chef du service politique
Aucun des deux n’était devant sa télévision ce soir-là et il faut admettre qu’ils avaient une bonne excuse : ni Gabriel Attal, ni Jordan Bardella n’étaient nés. Le dimanche 27 octobre 1985, sur TF1 à 19 heures – le meilleur moment en termes d’audience -, le Premier ministre Laurent Fabius affronte Jacques Chirac, président du RPR et l’un des chefs de l’opposition. Il lance ainsi la campagne en vue des élections législatives de mars 1986. C’est le socialiste qui a pris l’initiative de cette confrontation, et qui s’en mordra les doigts, arrivé épuisé sur le plateau – il revient tout juste d’un voyage à Mururoa, à l’autre bout du monde – et sortant de ses gonds alors qu’il tentait, précisément, d’énerver son adversaire. Un échange est resté dans les mémoires. Chirac : « Soyez gentil de me laisser parler et de cesser d’intervenir incessamment, un peu comme un roquet. » Fabius : « Ecoutez, je vous en prie, vous parlez au Premier ministre de la France. »

Seuls les idiots ne changent jamais d’avis. Dans les semaines suivant son arrivée à Matignon, Gabriel Attal ne souhaite pas débattre contre Jordan Bardella. Il est rarissime dans notre histoire politique qu’un Premier ministre accepte la confrontation directe avec un responsable de l’opposition. Outre le fameux Fabius-Chirac de 1985, on se rappelle le Barre-Mitterrand de 1977 et c’est à peu près tout. A la mi-février, Gabriel Attal confie : « Les Français m’attendent plus dans mes fonctions de de Premier ministre que dans celles de chef de la majorité. Faut-il que l’affiche de la campagne, ce soit moi ? Je ne suis pas sûr.  Ca accrédite ce que souhaite le RN, à savoir la nationalisation de la campagne ; et ca accrédite l’idée que je ne suis pas à 100% sur mes chantiers. En plus, c’est un cadeau à Bardella ! »

 Lundi, selon une information révélée par RMC, il a indiqué à quelques membres du gouvernement qu’il était finalement prêt à débattre avec Jordan Bardella. Le Canard Enchaîné affirme que c’est Emmanuel Macron qui le lui a demandé. A Matignon, le sujet divisait le cabinet en deux camps de taille égale mais le besoin de faire bouger les lignes et de préserver le Premier ministre contre les doutes naissants était de plus en plus fort.
Il faut dire qu’en quelques semaines le climat, comme les sondages, n’ont cessé de se dégrader dans la majorité. Plusieurs voix déplorent la discrétion de Gabriel Attal dans la campagne. Sa participation s’est pour l’heure résumée à un discours lors du meeting de lancement de campagne de Valérie Hayer et à un porte-à-porte avec la cheffe de file Renaissance. « Il ne voulait pas prendre la responsabilité de la défaite à venir, analyse un cadre Renaissance. Mais il y sera associé, autant la limiter. »

Ce duel Attal-Bardella ne peut que réjouir le camp présidentiel. Il n’est pas dénué d’ambiguïté stratégiques. La macronie chercher à ramener le scrutin à un étage européen, quand le Rassemblement national l’érige en référendum contre la politique gouvernementale. En ferraillant contre le leader d’extrême droite, le Premier ministre donne une teinte nationale à cette bataille, tant il n’est guère identifié sur les sujets européens. « Sa position est moins évidente que celle d’Edouard Philippe en 2019, note un eurodéputé. Lui avait tracé des sujets européens depuis deux ans, ce qui n’est pas le cas de Attal. » Mais nécessité fait loi. Les sujets nationaux vont déterminer le choix d’une grande partie de l’électorat. Impossible d’en faire l’économie. « Il ne faut pas fuir la politique nationale », a récemment confié l’ex-tête de liste Nathalie Loiseau à Valérie Hayer, au sujet de son débat télévisé du 2 mai avec Jordan Bardella. 

Le moment est en tout cas bien choisi pour annoncer ce revirement, alors que 37% des électeurs, selon un sondage Ipsos réalisé auprès d’un échantillon de 10 651 personnes, disent pouvoir encore changer de vote : le président du RN fait une non-campagne, peine à cacher ses limites et esquive toute confrontation – sans perdre le moindre point dans les sondages pour le moment. Cette fois, puisqu’il obtient gain de cause – il avait répété la veille sa volonté d’affronter le Premier ministre – il sera bien obligé d’accepter le débat. Les deux hommes auront l’occasion d’en parler dès jeudi : ils se retrouvent, dans le bureau du Premier ministre, pour la seconde fois depuis la nomination de ce dernier, officiellement pour parler de la violence des mineurs.
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