La Cour des comptes appelle l’État à clarifier les règles encadrant le recours aux cabinets de conseil privés et évalue à 890 millions d’euros le montant qui leur a été versé en 2021. Après le Sénat qui, en mars 2022, dénonçait un recours « tentaculaire » aux cabinets de consultants, c’est au tour de la Cour des comptes d’enfoncer le clou. Dans un rapport publié le 10 juillet, la première instance financière de France s'inquiète de certains usages « inappropriés » ; et accuse l’État de laisser certains prestataires privés remplir des missions relevant du « cœur de métier de l’administration », voire même d’intervenir dans des décisions régaliennes. Manque de définition claire de ces prestations, « référentiels comptables » inadaptés, erreurs de classification, suivi inexistant... Comme les sénateurs voici un an, la Cour déplore les difficultés rencontrées pour obtenir des informations fiables et complètes. Malgré cette opacité, les magistrats financiers ont calculé que ces prestations ont coûté 233,6 millions d'euros aux contribuables en 2021. Si on y ajoute les prestations commandées aux cabinets dans le domaine informatique, l’addition atteint 890 millions, un chiffrage proche de celui établi par le Sénat. À qui profitent ces commandes ? En 2021, le premier « fournisseur » de l’État était Sopra Steria (75 millions d’euros de contrats), suivi par Capgemini, CGI France et l’incontournable McKinsey (un peu moins de 17 millions d’euros). NON à la République des consultants ! Signez notre pétition ICI ! Bien que les dépenses soient retombées à 200 millions en 2022, année qui a vu l’introduction d'une circulaire intimant un moindre recours aux prestations externes, les magistrats financiers craignent que les mauvaises habitudes ne reviennent. La Cour estime que l'État doit poursuivre ses efforts de « ré-internalisation » des compétences et privilégier le travail de ses agents dès que c'est possible, sachant que le coût d'un consultant s'élève à environ 2800 euros par jour. Pour s’assurer que l’État ne puisse recourir que « de manière subsidiaire » aux cabinets, les magistrats formulent huit recommandations, dont l’identification des compétences internes, un pilotage unifié du recours à ces acteurs privés, et un contrôle comptable interne et externe plus étroit. Un pas dans cette direction a été initié avec le dépôt d’une proposition de loi afin d’encadrer le recours aux consultants privés. Déposé par les sénateurs Arnaud Bazin (LR) et Éliane Assassi (PC) ce texte attend toujours d'être examiné par les élus. Les deux sénateurs viennent pourtant de réaffirmer que le vote d’une loi est plus que jamais nécessaire, la circulaire adoptée en 2022 constituant un simple mur de papier. De son côté, le syndicat Syntec Conseil qui regroupe les cabinets de conseil, juge cette proposition de loi « déconnectée de la réalité », certaines de ses dispositions étant même jugées inconstitutionnelles. |