Cabinets de conseil : l’Inspection générale des finances confirme l’explosion des dépenses jusqu’en 2021, et épingle notamment certains ministères, dont celui de la Justice. Le titre du rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) n’est pas très sexy. Mais ce document baptisé « Rénovation de l’encadrement du recours aux prestations intellectuelles des cabinets de conseil » (lien ci-après) permet de revenir sur un scandale qui a éclaboussé jusqu’au perron de l’Élysée avec l’affaire McKinsey. Comme le Sénat qui dénonçait une emprise « tentaculaire », l’IGF confirme l’influence croissante des cabinets de conseil dans plusieurs pans de l’administration tricolore. Et la chiffre : les dépenses de « prestations intellectuelles » sont passées de 764 millions d'euros à 2 516 millions d'euros entre 2015 et 2021, soit une progression moyenne de + 22% par an. Cette hausse vertigineuse s’est notamment concentrée sur les missions « Stratégie et organisation » (une des spécialités de McKinsey) avec des dépenses passées de 10,4 millions à 128,9 millions d'euros en 2015 et 2021. Soit un taux de croissance annuel moyen de 52,1 %. Sur la même période, les prestations de conseil d’agences de communication et de publicité ont également enregistré une croissance record : 65,1 % par an, en moyenne ! En montant, ce sont les prestations de conseil en informatique qui ont dévoré le plus d’argent public. Près de 675 millions d’euros pour la seule année 2021. Lorsque l’on voit les plantages comme celui, récent du Guichet Unique (qui devait simplifier la vie des chefs d’entreprise), et, auparavant, celui de Chorus (progiciel comptable de l'État), ou encore de Louvois (progiciel de paiement des militaires), on ne peut que s’interroger sur le bien-fondé de ces missions. A l’exception du prélèvement à la source, l’informatisation de l’État est pavée de déficiences informatiques ! Pour limiter la casse, en 2022, le gouvernement a demandé aux services de l’État de réduire la facture des prestataires de 15%. Cabinets de conseil : une pratique mal encadrée
Depuis, des dispositifs d'encadrement ont été mis en place. Mais, ils sont plus ou moins pointilleux selon les ministères.
Par ailleurs, les outils permettant d’évaluer l'opportunité des missions et leur impact réel sont souvent approximatifs.
En octobre 2022, les sénateurs ont déposé une proposition de loi pour encadrer le recours aux consultants. Le gouvernement regimbe à inscrire ce texte à l'agenda de l'Assemblée.
L’IGF révèle également que les seuils financiers nécessitant l’examen d’un comité de suivi des prestations, diffèrent selon les entités ministérielles.
Par exemple, au ministère de la Justice, ne sont suivies que celles dont le montant dépasse 500 000 euros.
Toujours place Vendôme, les rapporteurs s’interrogent sur le recours à des cabinets externes lorsque l’administration dispose des moyens de réfléchir à son avenir par elle-même.
Et de citer une mission de 324 000 euros sur les extractions judiciaires (65 244 extractions en 2016) confiées à Ernst and Young (EY) par la chancellerie alors que 3 missions interministérielles avaient déjà planché sur le sujet…
Même réserve de l’IGF pour les 269.000 euros versés à EY pour la simplification des procédures de l’aide juridictionnelle, thématique déjà traité en interne par l’Inspection générale de la justice.
L’IGF invite l’État à une ré-internalisation intelligente des compétences au sein de l’administration.
Autre trou noir, les 800 établissements publics sous tutelle de l’État. Parmi les dépenses visées, celles de conseil en stratégie, (1,2 million d’euros) de l’Office national des forêts (2022) ou les prestations informatiques de la Bibliothèque nationale de France, la communication internationale du château de Versailles, etc., autant de prestations dont il faudra justifier le bien fondé. |