ChatGPT : opportunité ou menace ?
Les journalistes ou, dans le marketing, les rédacteurs SEO, pourraient-ils se retrouver sans emploi ? Un concurrent redoutable, venant tout droit de la Silicon Valley, suscite l'attention depuis plusieurs jours : ChatGPT, une application de conversation conçue par la start-up américaine OpenAI, cofondée par Elon Musk (qui a depuis quitté l'entreprise) et l'homme d'affaires Sam Altman. Grâce à son moteur de génération de texte GPT3, le chat peut écrire des poèmes, raconter des blagues (nulles), faire de la philosophie, résoudre des équations, s'emparer de questions politiques. Bref, accéder à (presque) toutes vos requêtes, de manière très crédible !
« Lorsque je lui ai demandé ce qu'Hitler avait fait de bien (un test typique pour voir si un bot devient nazi), il a refusé de me donner la liste »,
souligne Alex Kantrowitz.
« Un robot puissant est enfin arrivé ! », renchérit le journaliste, en comparaison aux pâles copies proposées par Google Assistant ou Facebook.
« La nouvelle star des réseaux sociaux est un robot »,
appuie le NewYork Times, saluant sa vitesse, sa précision et ses capacités d'écriture.
Depuis qu'il a été mis à la disposition du grand public sur une interface web gratuite fin novembre, la frénésie a touché plus d'un million de personnes.
Devant un tel engouement, que vaut une « plume » face à une technologie aussi avancée ?
« Un tel niveau d'automatisation pourrait bien faire disparaître des emplois. Cette préoccupation a déjà été soulevée par le passé avec la technologie avancée », plaide
le New York Times.
« Mais il y a une différence entre une machine qui peut aider à assembler des pièces de voiture et un robot qui peut penser mieux que les humains. » Story Jungle fait le point sur l'impact de ce chatbot de compétition sur les secteurs du marketing et du journalisme.
Les effets sur le marketingProduire du contenu marketing n'a jamais semblé aussi facile. Il suffit de donner à l'IA des mots-clés, des idées phares, pour que le logiciel produise un contenu écrit.
Le ChatGPT pourrait ainsi présenter plusieurs avantages pour le marketing. En utilisant des bots de conversation entraînés avec ChatGPT, les entreprises peuvent offrir une expérience client plus rapide et plus pratique pour les utilisateurs, ce qui peut libérer du temps pour les équipes de service client pour traiter les demandes plus pratiques. Les entreprises peuvent aussi créer des bots de conversation plus naturels et plus fluides, ce qui peut améliorer l'expérience des utilisateurs en leur proposant des offres personnalisées. En utilisant des bots de conversation entraînés avec ChatGPT, les entreprises peuvent aussi collecter des données précieuses sur les préférences et les comportements des utilisateurs, ce qui leur permet d'affiner leur stratégie marketing.
Le précédent paragraphe n'a pas été écrit par un journaliste, mais c'est la réponse donnée par ChatGPT à la question de l'impact de l'application sur le marketing. Flippant, non ? Quant à nous, nous sommes allés grappiller un peu de points de vue d'humains.
Sur un feed Reddit intitulé « How ChatGPT is an existential Threat to our profession ? », certains copywriters voient cette avancée d'un bon œil pour des commandes basiques :
« Un client m'avait demandé de rédiger plus de 200 000 mots en 6 mois pour un site de commerce électronique affilié à Amazon. La qualité de l'écriture n'était pas meilleure. Alors je me demande... », confie-t-il. « Cela peut nous permettre d'augmenter notre valeur », ajoute un autre.
Et sur le journalisme ? Ce refrain, on l'entend aussi chez les journalistes.
« Je me ferais davantage de soucis si j'étais à la tête d'un moteur de recherche comme Google. L'intelligence artificielle va surtout permettre de faire "mieux" en "augmentant" le travail rédactionnel (et en remplaçant celui à faible valeur ajoutée) »,
certifie Benoit Zante. Le rédacteur y voit une béquille pour combattre la « peur de la page blanche », trouver et affiner des angles. Dave Lee, journaliste du Financial Times, a ainsi trouvé le chatbot d'une impressionnante efficacité pour préparer une interview sur les énergies propres :
« Je me prépare pour une interview sur scène, dans un domaine que je ne couvre pas habituellement. L'outil a été formidable ! »,
s'enthousiasme-t-il.Mais qu'en est-il de cette part de profondeur, de nuance, d'empathie inhérente au métier de journaliste ? Un robot est froid, plat, sans saveur, et ne pourra jamais remplacer la richesse d'un contact humain. Comme le dit l'outil lui-même, le GPT est un modèle de langage avancé qui peut générer du texte de manière convaincante, mais il n'a pas été conçu pour remplacer les journalistes. Il peut aider le journaliste à effectuer des recherches. Mais le journalisme est un métier complexe qui implique de nombreuses compétences, telles que la recherche, l'analyse, la communication et l'éthique.
Par ailleurs, comme le rappelle The Atlantic dans un article intitulé
« ChatGPT est plus bête que vous ne le pensez », le journaliste peut trouver un certain réconfort face à ce énième concurrent dans le fait que le résultat produit par le robot « bien que fluide et persuasif en tant que texte, est toujours inintéressant en tant que prose ». On aura toujours besoin de récits incarnés et authentiques. John Warner, auteur du livre Pourquoi ils ne savent pas écrire, s'insurge depuis des années contre la rédaction en cinq paragraphes et a écrit
un thread Twitter sur la façon dont le ChatGPT reflète cette forme d'écriture standardisée.
« L'IA peut générer des écrits crédibles mais uniquement parce que l'écriture et nos attentes sont devenues si peu inspirées », pointe The Atlantic.
Enfin, on peut également soulever la question des droits d'auteur, qui concerne tout le monde (journalistes et copywriters). Certains dénoncent un
« blanchiment de droits d'auteurs », affirmant que le logiciel permet d'écrire du contenu à partir de textes déjà existants sans se soucier des droits d'auteurs. Le programme est en effet entraîné à partir d'un vaste échantillon de textes tirés d'internet (articles de presse, académiques, blogs, scripts de films...), généralement sans l'autorisation explicite des auteurs du matériel utilisé. Autre appréhension :
le spécialiste des médias Emmanuel Parody, lui, s'inquiète pour « les médias qui fournissent la matière brute mais qui n'auront plus le bénéfice du trafic ».
Une chose est sûre : ChatPGT ne laisse personne indifférent. Cette classe d'applications pourrait bien changer profondément la manière de faire notre métier.