Bonjour, Je vous écris depuis Paris où le Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle vient de se terminer. Ce grand rendez-vous a réuni chefs d’État, patrons de la tech et représentants de la société civile pour débattre de l’avenir de l’intelligence artificielle. Ce que j’y ai vu ? Des idées ambitieuses, un optimisme prudent et une certaine frustration quant à l’orientation prise par l’IA. Une question revenait sans cesse : sommes-nous réellement en train d’aborder les sujets difficiles qui garantiront que l’IA profite à toutes et à tous ? Pour beaucoup, le bilan du sommet est en demi-teinte, entre avancées notables et occasions manquées. La question de la régulation de l’IA a dominé la majorité des discussions, tandis que la concentration du pouvoir entre les mains des géants de la tech a été à peine abordée. Et malheureusement, certains enjeux majeurs comme l’impact sur l’emploi ou le besoin d’actions concrètes au-delà des engagements financiers ont été soit évités ou soit édulcorés pour ne froisser aucune sensibilité. Chez Mozilla, nous n’avons jamais eu peur de parler des sujets difficiles. Nous avons donc résumé les points essentiels de ce sommet, mais comme vous le savez, parler ne suffit malheureusement pas. Il est temps de défendre une IA ouverte, responsable et conçue pour l’intérêt général. Si vous pensez que l’IA doit être digne de confiance et au service de toutes et de tous, signez dès maintenant la pétition de Mozilla pour rejoindre notre mouvement. Je signe la pétition → 1. Le sommet a mis l’accent sur une IA au service du bien commun, et pas seulement des profits. Commençons par les bonnes nouvelles. D’ordinaire, l’IA est vue comme une sorte de grande course mondiale où les enjeux économiques l’emportent sur l’intérêt général. Mais les choses étaient différentes ici : pour une fois, l’IA au service de tous était au centre des débats. Prenons l’exemple du lancement de Current AI, une nouvelle fondation dévoilée lors du sommet pour faire avancer l’IA au service de l’intérêt public, avec le soutien du gouvernement français. Ou encore ROOST, une initiative privée (soutenue en partie par Mozilla !) qui vise à développer des outils ouverts pour la sécurité en ligne et la modération des contenus.1 Des dirigeants·tes comme Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, et Narendra Modi, premier ministre indien, ont également souligné l’importance de l’ouverture dans l’IA. La déclaration officielle du sommet a mis en avant des idées essentielles, comme la transparence, la lutte contre une concentration excessive du marché ou encore l’importance de promouvoir une diversité culturelle et linguistique. En parlant de diversité culturelle et linguistique, le projet Common Voice de Mozilla a été mis à l’honneur parmi les 50 initiatives reconnues comme pionnières en matière d’IA éthique.2 2. Malheureusement, les débats se sont vite transformés en une compétition pour savoir qui dominait l’IA. Tout cela est encourageant, mais il y a un grand MAIS. Nous sommes actuellement en pleine course mondiale à l’IA dans un climat géopolitique sous tension, et ce sommet l’a clairement mis en lumière. L’idée de rivaliser avec les États-Unis et la Chine a dominé les échanges. La France et l’Union européenne ont par exemple annoncé des initiatives visant à mobiliser plus de 100 milliards d’euros d’investissements dans l’IA.3 La question de la régulation a aussi fait débat. Beaucoup ont dénoncé les mesures visant à encadrer l’IA, les accusant d’être trop restrictives et de freiner l’innovation.4 Enfin, les tensions politiques étaient palpables. Les États-Unis et le Royaume-Uni ont refusé de signer la déclaration officielle du sommet, prenant délibérément leurs distances avec un texte qui mettait pourtant en avant l’inclusivité et la durabilité.5 3. Ce n’est qu’un début : le travail pour concrétiser les grandes promesses commence maintenant. Ce sommet doit être vu comme une étape importante, et non comme une fin en soi, pour avancer vers un écosystème d’IA plus ouvert et digne de confiance. L’enjeu désormais est de savoir si toutes ces discussions déboucheront sur un véritable changement ou resteront de simples déclarations d’intentions. Ce qui compte, c’est ce qui va se passer maintenant. Les dirigeants·tes politiques et économiques doivent à présent passer des paroles aux actes. Honorer leurs engagements sur l’ouverture, la transparence et la fiabilité de l’IA mais aussi investir dans les projets lancés lors du sommet. C’est aussi à nous, qui défendons une IA responsable, de leur demander des comptes et de continuer à exiger une IA qui soit non seulement innovante, mais aussi juste, transparente et au service de toutes et de tous. 4. Le sommet était plus inclusif que les précédents, mais il faut encore aller plus loin. En comparaison aux précédents sommets sur l’IA, comme celui de Bletchley Park en 2023, le Sommet pour l’action sur l’IA de Paris a marqué un certain nombre de progrès en matière d’inclusivité, en intégrant davantage de voix issues de la société civile, dont Mozilla. Espérons que cela devienne la norme pour les futurs sommets sur l’IA. Mais la simple présence de la société civile ne suffit pas. ONG, militants·tes et acteurs·trices locaux·les doivent pouvoir peser de tout leur poids dans les décisions prises. Inclure des perspectives diverses et leur donner les moyens de se faire entendre ne doit pas être une option, mais une condition impérative pour changer concrètement et durablement les choses. Si l’IA doit profiter à toutes et à tous, alors chacun doit pouvoir contribuer à façonner son avenir. 5. Ensemble, nous pouvons et nous devons développer une IA au service de toutes et de tous. La situation dans laquelle nous sommes me fait penser à une scène de dessin animé. Nous avons couru et couru sans nous rendre compte que nous avions dépassé la falaise, et nous continuons à gesticuler comme si le sol était encore sous nos pieds. Car c’est exactement où en est la gouvernance de l’IA : une course menée tête baissée, sans garde-fous nécessaires, pendant que le monde entier retient son souffle. Et la chute risque de plus en plus d’être brutale : les pouvoirs sont plus concentrés que jamais et le fossé entre la vitesse à laquelle l’IA progresse et notre capacité à en faire un outil au service du bien commun se creuse chaque jour davantage. Face à cette situation, nous pouvons soit continuer à faire semblant, soit affronter la réalité et développer une IA qui place les gens avant le pouvoir et l’argent. Je reste malgré tout optimiste. L’IA n’est pas forcément un précipice. Elle peut être un pont vers une technologie plus ouverte et responsable, pensée pour toutes et pour tous. Peut-être pas demain, ni le mois prochain, mais en utilisant les bons outils et en menant les bonnes actions, nous pourrons y arriver. L’avenir de l’IA se décide en ce moment, et nous sommes face à un choix : laisser les intérêts économiques et politiques décider, ou bien exiger une IA qui ne sacrifie pas tout sur l’autel de l’argent. Une IA capable de faire passer les intérêts des gens au premier plan. Alors si vous aussi, vous désirez défendre une IA au service de toutes et de tous, signez la pétition de Mozilla. Je signe → |
Merci pour tout ce que vous faites pour Internet et créer le futur numérique que nous méritons. Bien à vous, Nabiha Syed Directrice exécutive Mozilla Pour en savoir plus : 1. Découvrez ROOST sur le blog de Mozilla et Current AI. 2. Sommet pour l’action sur l’IA / Forum de Paris sur la paix : Découvrez en détail les 50 projets sélectionnés. 3. Reuters : Emmanuel Macron annonce 109 milliards d’euros d’investissements privés dans l’IA en France (article en anglais). 9 février 2025. 4. Politico : JD Vance avertit l’Europe de ne pas trop durcir la réglementation technologique dans un discours majeur sur l’IA. 11 février 2025. 5. Élysée : Déclaration sur une intelligence artificielle inclusive et durable pour les personnes et la planète. 11 février 2025. Guardian : Les États-Unis et le Royaume-Uni refusent de signer la déclaration du sommet de Paris sur une IA « inclusive » (article en anglais). 11 février 2025. |