Clubhouse bouscule le game
Alors que les organisateurs d'événements virtuels se creusent la tête pour attirer du public, Clubhouse bouscule l'ordre établi. L'application audio, lancée en mars 2020, « est le seul réseau permettant d'attirer 1 000 abonnés chaque jour en organique, sans dépenser 1 euro ».
C'est en tout cas l'expérience d'Anthony Bourbon, CEO de Feed, qui a su tirer parti des avantages de la plateforme très rapidement. En seulement deux semaines, son compte Clubhouse a récolté plus de 11 000 abonnés. « C'est une plateforme à privilégier lorsqu'on apprécie un format en direct, spontané et sans filtre », soutient-il. À raison de trois rooms par jour – sujets grand public, masterclass, échanges avec l'audience –, la stratégie est efficace, car quotidienne, régulière. Être présent sur Clubhouse aujourd'hui illustre surtout le fait que « votre marque est branchée, en avance sur son temps et qu'elle donne la parole à ses consommateurs ».
Et quitte à avoir une stratégie de contenus offensive, autant profiter de la portée généreuse de Clubhouse, tant qu'elle existe. Ça se passe maintenant. Même si la France est à la traîne en Europe, avec environ
45 000 utilisateurs (pointés la semaine dernière, ça va vite).
De son côté, Ruben Taïeb, fondateur de l'agence Le Cocon, confie avoir gagné trois clients grâce Clubhouse, cultivant son personnal branding : « Ce n'est pas mal, mais par rapport au temps passé dessus, pas tant que ça »,
nuance-t-il. « Je ne comprends pas encore tout à fait l'attrait du Clubhouse et des Spaces, mais si j'étais en charge de conférences "virtuelles" de l'industrie, je regarderais le phénomène un peu nerveusement »,
tweete le journaliste Jack Marshall, passé par le Wall Street Journal et Digiday. Pour la journaliste Clara-Doïna Schmelck, la logique actuelle des réseaux sociaux tels que Clubhouse (et Twitter Spaces) n'est plus de diffuser des contenus gratuitement, mais bel et bien de nous « engager à imaginer des animations gratuitement pour maintenir les utilisateurs plus longtemps sur une même plateforme ». Capter notre temps d'attention le plus longtemps possible.
Et à l'heure de la distanciation sociale, l'application constitue un parfait outil de réseautage, où les gens se rassemblent autour de sujets de niche. « J'avais créé une room autour du concept "36 questions pour tomber amoureux" et Scooter Braun, le manager de Justin Bieber, nous a rejoints »,
partage Andrew Lee, associé du fonds Initialized Capital et investisseur dans la start-up, dans les Echos.
Si la plateforme est une opportunité en or (pour l'instant) pour créer une communauté rapidement, elle en agace déjà certains. « Clubhouse partage des similarités avec les cours médiévales : la royauté a le droit tout puissant de convoquer des rassemblements et de décider des règles. Les nobles peuvent être appelés à s'exprimer. Les serfs doivent écouter », regrette Nathan Benaich, investisseur du fonds Air Street.
Après une semaine sur la plateforme, notre envoyé spécial Gilles Prigent (accessoirement CEO de Story Jungle) analyse : « Une pincée des débuts de Twitter, un petit arrière-goût de mandarinat, une louche d'entre-soi, et l'air frais des premières radios libres... Clubhouse irrite, rend addict, ringardise et défie les réseaux sociaux en place ». Au fait, on fait une room sur le sujet mardi 2 à 13h. Venez en débattre avec nous.