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« Il serait aisé d’appliquer aux femmes tout ce que j’ai dit des hommes » : le féminisme silencieux de Sophie de Grouchy
Dr Kathleen McCrudden Illert

Joan Scott, dans son texte fondateur sur le féminisme dans la Révolution française, a écrit sur la position « paradoxale » dans laquelle la nouvelle définition, exclusivement masculine, de la citoyenneté a placé les femmes qui cherchaient à s’intégrer dans la sphère politique. Selon elle, les femmes étaient contraintes soit de nier leur différence avec les hommes, soit d’affirmer leur féminité et de saper ainsi leur cause. Cet article soutient qu’il existait une troisième manière, tout aussi paradoxale, mais potentiellement plus efficace, pour les femmes politiques de cette période de défendre leur inclusion dans la sphère politique. Il s’agit du refus de s’engager dans le sujet : dans certains contextes, un silence presque total sur le sujet des femmes pourrait en soi être un argument politique puissant. S’appuyant sur des études contemporaines sur le genre et le développement, ainsi que sur l’exemple de Sophie de Grouchy, actrice politique pendant la Révolution française et épouse de Condorcet, cet article interroge l’importance des silences dans l’histoire intellectuelle. En construisant une méthodologie provisoire pour lire ces omissions, l’auteur soutient que cela est essentiel pour l’évolution de l’histoire du féminisme.

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L’école à l’ère de l’Anthropocène : explorer notre rapport au monde par le biais d’une géographie relationnelle, vécue et sensorielle
Suzy Blondin, Justine Letouzey-Pasquier et Patrick Roy

Comment le paradigme Anthropocène nous pousse-t-il à repenser l’enseignement de la géographie et l’éducation en général ? Cet article vise à analyser le changement de paradigme insufflé par le concept d’Anthropocène et du rôle clé de la géographie dans ce contexte. Nous discutons notamment du besoin de dépasser les dualismes modernistes et d’aller vers des sciences plus relationnelles afin de mieux reconnaître nos interdépendances et ainsi revoir notre rapport au monde. Cet article s’inscrit dans les débats actuels en sciences humaines et sociales et a comme but d’explorer différentes approches éducatives et outils didactiques pouvant aider à relever les défis soulevés par le paradigme Anthropocène. La contribution empirique du papier permet de discuter ces défis, mais aussi les possibilités offertes par ce paradigme, dès l’école primaire.

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Un intermédiaire monétaire créateur de proximités territoriales : la structuration d’un réseau d’entreprises autour de la monnaie locale eusko au Pays basque
Mathilde Fois Duclerc, Oriane Lafuente-Sampietro

Cet article examine le rôle joué par une monnaie locale dans la construction de proximités organisées entre entreprises d’un même territoire. En définissant la monnaie locale comme un opérateur d’intermédiation, il s’attache à préciser les rôles joués par ce dispositif auprès des acteurs économiques qui s’y enrôlent. L’étude de données issues du cas de l’eusko au Pays basque montrent que la monnaie remplit plusieurs fonctions d’intermédiation qui génèrent de la proximité en activant des logiques d’appartenance et de similitude parmi les acteurs économiques engagés. L’analyse des usages de la monnaie locale par les entrepreneurs révèle en outre la centralité d’une dimension morale dans la construction de ces formes de proximité.

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Liberté, Union européenne, OTAN : la société ukrainienne a fait son choix
Olexiy Haran, Petro Burkovskyi

Les mutations sociales engendrées par l’invasion russe ont renforcé une tendance prévalant depuis 1991 et 2014. La société ukrainienne a complètement rompu les liens avec son passé soviétique et avec la Russie autoritaire moderne.

Un an de guerre en Ukraine : où en sont les Russes ?
Tatiana Kastouéva-Jean

En Russie, la guerre ne se traduit pas par une prise de conscience de la nature du pouvoir russe, de la dégradation profonde de l’état de droit et des libertés ou de la lourdeur des conséquences pour l’évolution ultérieure du pays et son positionnement international.

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« Quand plaideurs et accusés escaladaient le Parnasse ». Histoire de la défense en vers (XIX^e siècle-années 1930)
Anne-Emmanuelle Demartini

L’article aborde la question du « droit comme littérature » en traitant de la défense en vers dans les tribunaux français au XIXe siècle. À partir d’un corpus documentaire élargi, il propose des éclairages neufs sur cette pratique insolite qui se révèle plus importante que prévu. Née sous la Restauration, elle traverse tout le siècle et se maintient jusqu’aux années 1930. Mais ses acteurs, sa signification et les réactions qu’elle suscite se modifient. Jusqu’aux années 1850, elle est marquée par une étroite solidarité entre poésie et politique, ce qui explique qu’elle puisse susciter la ferveur. Mais la figure du poète engagé dans la défense de la liberté d’expression cède ensuite la place au délinquant : la défense en vers se dépolitise tandis que les journaux y voient une expression des bas-fonds et tournent en dérision ces prouesses d’audience, illustrant la séparation croissante des espaces du vers et de la prose.