Autrice, scénariste et podcasteuse, Kalindi Ramphul nous offre avec Les jours mauves, un 1er roman tout en contrastes, mêlant, avec un sens inné de la formule, gravité et légèreté, humour, poésie et sensualité. Inspiré de sa propre histoire, le livre est une réécriture joyeuse et lumineuse d’un deuil, celui d’un père autant aimé que détesté, et la réalisation d’un projet avorté, celui d’un hommage en forme de road-trip, rocambolesque épopée d’une improbable équipée lancée à l’ascension d’un sommet où se cachent les clés du passé.
Joyeuses funérailles
Que faire quand la Covid-19 a mis à mal vos projets de voyage en l’honneur de votre défunt père ? Quand vous avez le talent de Kalindi Ramphul, vous décidez de projeter sur le papier le film de cette rocambolesque odyssée avortée. Il n’est pas trop exagéré de parler de film tant l’auteure excelle dans l’art de mettre en mots et en images des personnages croqués avec un humour mordant mais toujours bienveillant, dans des scènes aussi improbables qu’inoubliables. Dans Les jours mauves, Kalindi devient Indira, cheffe pas vraiment assumée d’une bande désorganisée qui a répondu oui comme un seul homme à cette proposition aux délicieuses effluves alcoolisées : « Qui veut m’accompagner balancer [les cendres de] papa sur Mars ? » Voilà comment se met en marche « ce convoi pour l’Apocalypse » à bord d’un car jaune poussin où se frôlent entre autres « un régiment d’hommes musclés », « des intellos bizarres », « un yogi blanc en sarouel », et « un lézard à lunettes » En l’honneur de Suraj Ramgulam, flamboyant prince à la peau dorée, tous ont accepté cette traversée de la France direction les Pyrénées. Embarqués dans cette parenthèse (dés)enchantée, ils vont traverser cœurs contre cœurs « les frontières du temps, de l’espace et de la mort », la célébrant et l’honorant dans « un bordel [non pas] sans épithète », mais foutraque et joyeux. |