Elon Musk, Twitter et les annonceurs : l'avenir « flou »
Lundi 25 avril, Elon Musk, le fantasque patron de Tesla et de Space X a passé un accord définitif avec le conseil d'administration de Twitter pour acquérir le réseau social à l'oiseau bleu pour 44 milliards de dollars. Ce « Citizen Kane du numérique »,
comme le surnomme le New York Times, souhaite
« un Twitter qui fonctionne comme il l'utilise : sans retenue ». Soit
« une arène inclusive pour la liberté d'expression », selon la définition de l'homme le plus riche de la planète. Si Twitter était amené à revenir sur la modération du contenu, cela signifierait davantage de discours haineux et violents. Ce changement pourrait dissuader les annonceurs d'investir sur la plateforme, soucieux de l'environnement « safe » dans lequel sont diffusées leurs publicités. On fait le point sur la relation actuelle entre les deux partis.
Le contexte D'après le Financial Times, Twitter a cherché d'emblée à rassurer les annonceurs sur les projets de liberté d'expression d'Elon Musk. À la suite de l'annonce de l'accord, la société a écrit aux agences, soutenant que Twitter sera vigilant à ce que les publicités ne soient pas à côté de contenus nuisibles et offensants. Précisons que l'activité actuelle de Twitter est presque entièrement financée par la publicité. D'après eMarketer, la publicité a représenté 89 % du chiffre d'affaires de Twitter en 2021 et devrait atteindre plus de 91 % en 2023.
« C'est grâce à la publicité que Twitter existe »,
rappelle TechCrunch.La réaction « mitigée » des annonceursPour Nicolas Bordas, vice-président de l'agence de communication TBWA International, la posture politique d'Elon Musk sur la liberté d'expression
« est contradictoire avec le modèle économique actuel de Twitter qui repose sur une attente de "Brand Safety" de la part des annonceurs ».
D'après le Financial Times, la réaction initiale des annonceurs au changement de propriétaire a été
« mitigée ». Certains ont salué les projets de Musk concernant l'authentification et la suppression des faux comptes ou « bots », tandis que d'autres craignent
« qu'ils ne défassent les progrès que Twitter a commencé à faire récemment pour sa modération de contenu ».
La plupart des annonceurs sont prêts à attendre et à voir plutôt que de retirer leurs budgets immédiatement. Sans toutefois trop se faire d'illusions.
« D'une manière générale, on s'attend à ce que les commentaires de Musk conduisent Twitter à devenir plus toxique et moins favorable aux marques », a déclaré Brian Wieser, président Business Intelligence chez GroupM.
Ceux qui s'inquiètent vraiment... sont les constructeurs automobiles. Ils craignent que leurs plans de campagne marketing ne fuitent vers Tesla. Et sont
« réticents à dépenser de l'argent sur une plateforme qui est désormais étroitement associée à l'un de leurs plus grands rivaux », souligne le Financial Times. Henrik Fisker, directeur général du constructeur de véhicules électriques Fisker,
a ainsi supprimé son compte Twitter après l'annonce de l'accord, invitant sa communauté à le rejoindre sur Instagram.
L'importance relative de Twitter Dans le cœur des annonceurs, Twitter est cependant souvent relégué au second plan. Faire de la publicité sur la plateforme ou non ne semble pas être un enjeu capital.
« Communiquer dessus, c'est la cerise sur le gâteau, une opportunité, pas une nécessité », remet en contexte Nicolas Bordas, de TBWA International,
« Twitter n'est pas un "must have", c'est plutôt un "nice to have" ».
Un point de vue partagé par Digiday qui rappelle qu'en matière de paid advertising, les annonceurs préfèrent se tourner vers TikTok, coup de cœur de la plupart des spécialistes du marketing :
« Twitter est plus un "town square" qu'un "Times Square". Les gens sont là pour la conversation, et non pour la publicité », observe Brendan Gahan, partenaire et responsable des questions sociales chez Mekanism.
De son côté, Musk s'est aussi demandé si Twitter devait se concentrer sur les recettes publicitaires. Son futur modèle économique « reste flou », d'après Digiday. Pour Nicolas Bordas, Elon Musk prévoit sans doute de basculer vers un modèle où Twitter sera financé par ses utilisateurs, par le biais d'abonnements. À suivre.