Ras le bol des dictateurs sanguinaires? Passez aux escrocs. Si comme moi cette semaine, vous ressentez le besoin de débrancher des infos 24h sur 24 pour vous changer les idées, ne serait-ce que pendant quelques heures, j’ai la solution pour vous. Avez-vous entendu parler d’Anna, Simon et Marco ? Si ce n’est pas le cas, personne ne vous en voudra, il y a trois mois, ils étaient encore seulement connus dans leur immeuble, ou plutôt dans leur cour de prison. Mais Netflix est passé par là et depuis décembre, trois programmes cassent la baraque, tous basés sur les histoires vraies de filous XXL. Par ordre d’entrée en scène, « Les rois de l’arnaque », de Guillaume Nicloux, nous a permis de rencontrer l’inénarrable Marco Mouly, qui aurait détourné 283 millions € dans le cadre du scandale de la taxe carbone. Puis est arrivé « L’arnaqueur de Tinder » alias Simon Leivi, bellâtre caricatural et escroc du cœur. Fermant le banc, la glaçante Anna Delvey, dont la vie est racontée dans « Inventing Anna » de Shonda Rimes. Plus différents que ces trois personnages, il n’y a pas. Leurs seuls points communs étant la cupidité et le cynisme, on peut se demander pourquoi ils nous plaisent autant. Car tout le monde les adore : Simon, l’arnaqueur de Tinder a été approché pour faire de la téléréalité et des « podcasts sur la séduction » aux Etats-Unis, le culot de Marco Mouly enchante les sages boomers et les tenues d’Anna Delvey sont scrutées par la génération Z... Qu’est-ce que ces culture-pop stars inattendues racontent donc de notre époque ? Sommes-nous devenus, comme eux, prêts à tout pour briller ? Sans doute pas, il y a quand même une fin « morale » à ces histoires, les trois protagonistes étant tous passés par la case prison, et on peut imaginer qu’un des premiers ressorts de ces succès, c’est le soulagement de ne pas faire partie des victimes (les Tinder-frimeurs ont intérêt à cacher leurs grosses montres désormais). En revanche, cette fascination dit tout de même qu’observer des gens essayant de casser un système est devenu une sorte de défoulement collectif. Et si les escrocs sont en passe de devenir nos nouveaux héros, c’est peut-être qu’en cette période si sombre, ils présentent un immense avantage. Ne pensant qu’à leur tronche, ils n’ont jamais rêvé de lever une armée pour envahir un pays frère.
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