Influenceur way of life
Dans l'imaginaire collectif des jeunes générations, le moyen le plus rapide pour devenir riche serait de devenir... influenceur. «
Si l'on regarde la liste des métiers que veulent faire les jeunes plus tard : influenceurs et youtubeurs arrivent en haut de la liste »,
constate Vincent Manilève, journaliste spécialisé dans les réseaux sociaux. Entouré par Squeezie, Lena Situations et compagnie, chacun voudrait sa part du gâteau numérique. Fort de ce constat, «
la première école d'influenceurs en France », Ambaza, a ouvert ses portes en mai 2022. Créée par Nicolas Brzustowski, un diplômé de l'IAE de Metz et «
serial entrepreneur », selon sa bio LinkedIn, la société –
au site web bancal et à l'orthographe approximative – a suscité la polémique sur les réseaux sociaux.
Une vidéo promo caricaturale
Devenue virale sur les réseaux sociaux ce lundi 11 juillet,
la vidéo promotionnelle de l'offre – mettant en scène yachts, piscines, tours en hélicoptère, champagnes et filles en bikini – propose une formation en ligne de 28 heures en visioconférence à 1 200 euros. À la clé de ces cours express délivrés par des experts marketing non cités («
Nous ne voulons pas les nommer pour éviter qu'elles soient pointées du doigt durant cette polémique », précise le fondateur au Figaro Étudiant) ? 20 000 followers et 5 000 euros par mois ! Et à l'issue de la formation : ni trace de diplôme ni de certification officielle.
La vidéo,
qui n'est pas sans rappeler celle du jeune entrepreneur et de « sa question vite répondue », a fait le buzz sur Twitter : 3 millions de vues ! «
Pour une jeune start-up, c'est une aide précieuse. Même M6 a parlé de nous dans son 19.45 », s'est félicité Nicolas Brzustowski.
Pour le journaliste Hugo Clément, qui a publié une vidéo sur son Instagram, l'offre est tout simplement risible : «
Ils ne savent plus quoi inventer. En tout cas c'est cool, ils ont bien compris l'urgence climatique et ça ne ressemble pas du tout à une arnaque. » Même son de cloche chez Bon Pote, qui ironise : «
Il est plus facile d'imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme. »
La partie émergée de l'iceberg
Pour Vincent Manilève, cette école n'est que la partie émergée de l'iceberg. De nombreuses formations en ligne existent déjà pour devenir influenceur à l'image de celles proposées par exemple par le youtubeur Math Podcast, connu pour avoir plagié des vidéos. «
Ce type d'école ne sert qu'à renforcer les stéréotypes sur les influenceurs. On ne parle pas de passion ni de ligne éditoriale, mais simplement de faire du contenu. Ça reprend les codes esthétiques des vidéos de tradeurs qui font de la promotion pour des gouffres financiers : belles voitures, montres de luxe », explique-t-il.
«
Cela fait miroiter du succès facile alors que la plupart du temps, il y a des systèmes pyramidaux derrière, et seuls les gens en haut s'en sortent », alerte-t-il. Malgré toute leur bonne volonté, la majorité des influenceurs ne gagnent pas leur vie.
En dehors des formations en ligne, une volonté de cadrage dans un « Far West »
À côté de ces formations en ligne bancales émerge un marché plus cadré. En France, les offres plus formelles apparaissent petit à petit. Avec une volonté d'institutionnaliser,
l'ISCPA Paris a ainsi ouvert aux élèves post-bac l'école ffollozz. Le but ? Préparer aux métiers du marketing d'influence et
« aux exigences de ce marché récent en pleine effervescence » où les influenceurs et les marques ont du mal à trouver un terrain d'entente.
En effet, de nombreux influenceurs ont du mal à satisfaire les attentes des marques. Et celles-ci, relativement frileuses, ne souhaitent pas prendre le risque de ternir leur image avec des créateurs.
Comme le partage Leïla Lévêque, ancienne professionnelle du web influence, qui a collaboré avec des influenceurs dès 2017, les partenariats sont beaucoup moins fructueux qu'auparavant : « À
cette époque, toutes les marques voulaient communiquer ainsi et il y a eu des opérations très réussies. Mais petit à petit la rareté s'est perdue et les projets étaient moins aboutis, moins cohérents. » L'experte s'appuie désormais sur les journalistes et les médias pour asseoir sa communication.