La réforme du droit d'auteur : un cas critiqueC'est une bataille sanglante qui vient de s'achever. Après deux ans de négociations houleuses, le Parlement européen a définitivement adopté le 26 mars la directive relative au droit d'auteur. Un texte controversé, qui devrait a priori contribuer à une meilleure rétribution des médias et des artistes, à l'ère des « ogres » numériques. Cette directive a été farouchement combattue par les géants américains ainsi que par les partisans de la liberté du Net.
« Les deux plus grandes plateformes américaines siphonnent aujourd'hui près de 80 % des revenus publicitaires sur internet, soit des dizaines de milliards de dollars par an. Payer quelques centaines de millions aux producteurs de contenu ne signera pas leur arrêt de mort », ont dénoncé dans une tribune quelques centaines de dirigeants de journaux en Europe. En effet, avec la nouvelle législation, les Gafam se verraient contraints non seulement de rémunérer les éditeurs de presse dont ils diffuseraient les contenus mais aussi de passer des accords avec les auteurs et de filtrer les œuvres publiées.
On pourrait se féliciter de telles mesures qui devraient dompter l'appétit de ces pieuvres numériques, mais il s'agit pour certains d'une grave illusion.
C'est en tout cas l'avis de La Quadrature du Net, une association qui défend les libertés fondamentales dans l'environnement numérique : «
Cette directive est un deal entre les industries du numérique et celles des contenus. Les sociétés de droits d'auteur, les producteurs de musique et les éditeurs de presse veulent leur part du gâteau dans les profits que génèrent les Gafam, assure Lionel Maurel, cofondateur de l'association.
Si vous prenez YouTube, par exemple, la plateforme génère toute sa richesse non pas via la publicité mais via l'utilisation des données des internautes revendues à des annonceurs publicitaires. Ce sont ces profits-là que l'industrie des contenus veut récupérer. Mais rien ne dit qu'elle les redistribuera correctement à la masse des créateurs européens. » Tous les acteurs ont deux ans pour accorder leurs violons. La lutte se poursuit.