Le règne des influenceurs virtuels ne fait que commencer…
Dans un souci de rentabilité accrue et de contrôle rigoureux de leur image, de plus en plus de marques s'appuient sur des influenceurs virtuels pour incarner leurs campagnes publicitaires et assurer leur promo sur les réseaux sociaux.
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Les influenceurs virtuels sont un phénomène en plein essor. Ce qui semblait auparavant être un moyen d'expression marginal est soudainement devenu central dans nos expériences numériques. Et alors que nous nous dirigeons vers l'ère du métaverse, il ne peut qu'augmenter. » Becky Owen sait de quoi elle parle. Chez Meta, elle occupe le poste de Head of Creator Innovation & Solutions, et une grande partie de son job consiste à analyser les nouvelles tendances sur Instagram pour mieux accompagner les créateurs de contenus. Humains et IA confondus. Car sur le réseau au logo en forme d'appareil photo, les influenceurs virtuels sont aujourd'hui légion... (et ils ont même droit au badge «
verified »).
De Rihanna à Lil Miquela Certes, le concept n'est pas nouveau. D'une certaine manière, Monsieur Propre, Captain Iglo ou le chat de Feu Vert sont tous des influenceurs virtuels (ancestraux, pour les deux premiers) créés par des marques pour promouvoir leurs produits. Mais avec l'avènement de l'intelligence artificielle générative, le prisme s'est inversé et
dévoile de nouveaux horizons pour les publicitaires. Désormais, ces égéries factices – bluffantes de réalisme – sont créées en amont par des agences de com', qui louent ensuite leurs services aux marques.
Du luxe à la tech, en passant par la mode, l'agroalimentaire ou les grands constructeurs automobiles, le business est florissant. Et commence à empiéter sérieusement sur celui des influenceurs en chair et en likes. D'autant que, comme eux, ces concurrents virtuels continuent « d'exister » entre deux campagnes de marque, en postant du contenu pour leurs millions d'abonnés sur les réseaux sociaux. 2,6 millions précisément, pour
Miquela Sousa, aka « Lil Miquela », créée en 2016 par
Brud – une startup californienne spécialisée dans la création d'avatars – et qui fut la première influenceuse virtuelle occidentale à réellement casser les compteurs. Au point de culminer à plus de 3 millions de followers en 2018, de rejoindre Kanye West, Rihanna ou Donald Trump dans le Top 25 des personnalités les plus influentes du web
établi par le Time cette année-là, et de générer près de 10 millions de dollars de revenus en 2020 avec des annonceurs comme Chanel, Prada, Calvin Klein, Samsung, BMW ou Dior.
Un nouveau modèle d'engagement Depuis, le phénomène a conquis la planète,
avec le Brésil en porte-étendard. Au pays du foot et de la samba, ce sont aujourd'hui des personnages comme
Lu do Magalu et ses 31 millions de followers cumulés (dont près de 7 millions sur Insta) qui font la pluie et le beau temps sur le marché de l'influence.
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En observant la façon dont ils s'expriment sur nos plateformes, nous constatons que les influenceurs virtuels sont uniques dans leur manière de se connecter avec leurs audiences. Ils allient le storytelling et la créativité propres à la fiction à un engagement que nous ne voyons généralement que chez les influenceurs humains, développe Becky Owen dans
cet article du site Virtual Humans (qui, au passage, dresse l'inventaire des 35 avatars les plus suivis dans le monde).
Ils exercent même leur propre forme d'influence, comme en témoignent les sentiments exprimés dans les commentaires de leur profil et l'afflux de partenariats répétés avec des marques. Ce mélange semble créer un nouveau type de modèle d'engagement, que nous commençons tout juste à décrypter. »
Et les chiffres confirment la tendance. Selon
une étude réalisée par The Influencer Marketing Factory en mars 2022 aux USA, 58% des utilisateurs américains suivent au moins un influenceur virtuel (25% pour ses contenus, 19% pour le storytelling autour et 15% parce qu'il les inspire) et 35% ont déjà acheté un produit ou un service dont il faisait la promotion.
Le futur de l'influence ? «
L'intelligence artificielle leur permet de simuler la vie réelle, la personnalité et les interactions qui semblent naturelles. Les influenceurs virtuels sont comme des héros de séries TV ou de mangas qui fascinent leurs followers à qui ils donnent vie à leurs aventures. Ils s'appuient sur les codes de Netflix, des téléréalités et des magazines people, avec une parfaite maîtrise des réseaux sociaux », analyse Oihab Allal-Cherif, professeur à la NEOMA Business School
dans cet article paru sur le site de
Forbes.
Livi, la «
digital muse » du groupe LVMH,
Noonoouri chez Dior,
Candy pour Prada,
Liv chez Renault... et même
Anne Kerdi pour vanter les trésors de la région Bretagne, la liste s'allonge chaque jour un peu plus.
Et les performances suivent.
Selon
une autre étude publiée par AspireIQ, le taux moyen d'engagement d'une campagne ayant recours à des influenceurs virtuels était de 5,9% en 2023, soit le triple de celui d'une campagne menée avec des humains (1,9%). Même le ROI moyen est supérieur (13,7% contre 12,3%) ! Résultat : 37% des publicitaires interrogés sont déjà convaincus que les avatars vont remplacer les véritables influenceurs, et 61% comptent incorporer l'influence virtuelle à leur stratégie dès cette année. D'autant qu'ils peuvent déjà compter sur des boîtes spécialisées comme Brud, donc.
Mais aussi
theClueless, l'agence espagnole derrière
Aitana Lopez et
Maia Lima, deux mannequins virtuelles qui sont très vite devenues le cauchemar des influenceuses mode de l'autre côté des Pyrénées. «
Nous explorons ce vers quoi ce nouveau chapitre du marketing d'influence pourrait éventuellement évoluer – à la fois en bien et en mal – afin d'aider les marques à surmonter les dilemmes éthiques de ce média émergent, promet Becky Owen.
C'est vraiment fascinant et j'ai hâte de découvrir la suite ! » Nous aussi, Becky, nous aussi...