L’hégémonie du Parti populaire européen (PPE), qui domine les trois principales institutions européennes, est incontestable. En effet, treize des 27 commissaires européens, ainsi que la présidente de la Commission européenne elle-même appartiennent au PPE, et douze chefs d’État et de gouvernement représentent actuellement la famille politique de centre-droit aux réunions du Conseil européen. De plus, le PPE est le plus grand groupe au Parlement européen, avec 188 eurodéputés sur 720. La présidente de l’hémicycle, Roberta Metsola, appartient également au PPE. Manfred Weber, qui est à la fois chef du parti paneuropéen PPE et du groupe du PPE au Parlement européen, est accusé de s’allier avec l’extrême droite afin de faire adopter — ou de retirer — certains textes à Bruxelles. Lors d’une interview avec l’équipe des Capitales cette semaine, il ne s’est pas excusé d’avoir fait échouer le projet de loi visant à lutter contre le greenwashing, affirmant plutôt que cela faisait partie de sa stratégie pour contrer la montée des populistes d’extrême droite. Ses députés européens ont rejeté la loi sur les allégations environnementales au Parlement européen la semaine dernière, arguant qu’elle serait trop contraignante pour les entreprises. « Nous ne soutiendrons jamais une règlementation qui [implique] que vous devez obtenir une autorisation préalable pour [faire de la publicité] dans vos médias », explique le responsable politique allemand à propos du projet de loi, qui semble désormais voué à l’échec. Dans une allusion à la Hongrie notamment, il affirme également : « Nous devons mettre un terme à la vague autoritaire qui déferle sur ce continent. Et le PPE est le premier parti à agir en ce sens ». Mais ses adversaires politiques soutiennent qu’il fait le jeu des populistes. Mercredi 25 juin, la dirigeante du groupe des Socialistes et Démocrates européens (S&D) au Parlement, Iratxe García Pérez, a rencontré la présidente de la Commission — l’Allemande Ursula von der Leyen — et l’aurait avertie, selon un responsable du groupe S&D, que sans un « engagement réel et public » à travailler avec les groupes centristes qui l’ont élue pour un second mandat l’hiver dernier, la seule autre option serait de « se retirer ». « Nous ne pouvons plus soutenir un projet qui légifère avec l’extrême droite », a ajouté le responsable. Pendant ce temps, les Patriotes pour l’Europe, groupe d’extrême droite mené par Jordan Bardella, se réjouissent de leur nouveau rôle au cœur des jeux de pouvoir politique à Bruxelles. Pour le président du PPE, c’est cela la démocratie. « Les gens doivent voir que s’ils ne votent plus pour les Verts ou les Socialistes, les choses changent au niveau européen. [Sinon] ce n’est pas démocratique », souligne-t-il. Il a également critiqué le groupe S&D, deuxième plus grand groupe au Parlement avec 136 eurodéputés, le jugeant déconnecté de la nouvelle réalité politique en Europe, et même de ses propres collègues socialistes au Danemark, en Suède et en Allemagne. « Réfléchissez à nouveau à ce qui se passe en dehors de cette bulle bruxelloise », demande-t-il, adressant également cette remarque au groupe libéral Renew Europe. Manfred Weber a toutefois tendu un rameau d’olivier aux socialistes et aux libéraux. « Sur la grande question du CFP [le cadre financier pluriannuel, le budget sptennal de l’UE, NDLR], sur la grande question de l’avenir de la compétitivité, nous avons besoin les uns des autres. La porte est toujours ouverte », soutient-il. À 53 ans, le Bavarois est au sommet de sa carrière à Bruxelles, après 21 ans passés sur les bancs du Parlement européen. Il a déclaré avoir passé ces derniers jours à préparer le sommet du Conseil européen avec les plus hauts responsables politiques européens. Pourrait-il devenir le prochain commissaire allemand, succédant ainsi à Ursula von der Leyen ? Il ne l’a pas démenti. En 2019, lorsque Ursula von der Leyen a été élue pour son premier mandat, elle avait battu Manfred Weber, en lice pour devenir président de la Commission. Lisez l’intégralité de l’interview, qui aborde également les raisons pour lesquelles l’UE est un « laboratoire d’idées » ainsi que les projets de Manfred Weber en matière de défense (en anglais). |