"Le grand-père et le Président", la chronique de Xavier Fontanet. Chapitre 14. ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌ ‌

Les ronds-points. "Le grand-père et le Président", la chronique de Xavier Fontanet. Chapitre 14.

 

Écrit par Xavier Fontanet - Membre de l'Institut des Solutions

Portrait Xavier Fontanet

Xavier Fontanet est essayiste, ancien directeur général des Chantiers Bénéteau et ex-président d’Essilor. Il est membre de l'Institut des Solutions. Il est notamment l’auteur de "Si on faisait confiance aux entrepreneurs. L’entreprise française et la mondialisation" (Les Belles Lettres). Xavier Fontanet signe pour Contribuables Associés une série de chroniques exclusives intitulées "Le grand-père et le Président". Il y livre ses recettes de bon sens pour relever la France.


La scène se passe à Paris en 2027, où une discussion s'ouvre entre un grand-père, Auguste, 90 ans et toute sa tête, et son petit-fils Antoine, qui en a 40. Auguste a vécu en province, il a fait toute sa carrière en entreprise, il dispose, du fait de son métier, d’une grande expérience internationale. Antoine, son petit-fils, lui, a vécu à Paris, a fait l’ENA et travaillé dans l’administration, puis dans les cabinets ministériels. Il est entré en politique et vient d'être élu président de la République. Il a l’habitude de demander conseil à Auguste, avec lequel il a un lien très fort. Dans ce 14e chapitre, nous les écoutons échanger sur la folie très française des ronds-points, et partant de cet exemple, de l'art de conduire des réformes.


Les ronds-points

 

- Antoine -

Grand-père, j’ai bien aimé notre conversation sur le CESE, cela m’a fait réfléchir, surtout ton réflexe de le fermer …tout simplement. En me levant ce matin je me suis réveillé en pensant aux ronds-points. Tu ferais quoi ?

 

- Auguste -

Bon réflexe ! C’est vrai qu’on en a déjà parlé plusieurs fois. Les ronds-points, au fait, quand est-ce que l’idée a été lancée ?

 

- Antoine -

Dans les années 1970.

 

- Auguste -

Au départ c’était bien, ils ont mis des ronds-points dans des coins dangereux et je suis persuadé que ça a réduit les accidents. Mais on continue à en mettre partout, à des endroits où ça ne sert à rien, pire cela provoque des coups de freins inutiles et des accélérations… pas très écologique ! Tu sais combien il y en a ?

 

- Antoine -

Je pense qu’il y en a à peu près 50 000.

 

- Auguste -

Ça coûte combien un rond-point ?

 

- Antoine -

Entre 250 000 et 1 million d’euros.

 

- Auguste -

Je fais un calcul à la louche, je prends 750 000 euros par rond-point, ça fait 35 milliards en 34 ans, soit en gros un milliard par an. Tu pourrais demander qu’on arrête ou qu’on baisse le financement de 90 % ?

 

- Antoine -

Les lignes de crédit sont votées, donc l’argent tombe chaque année, on ne se pose pas de question.

 

- Auguste -

C’est justement le genre de question à se poser dans une période comme la nôtre !

 

- Antoine -

Si on arrête on va dire que c’est des jobs en moins.

 

- Auguste -

Il faut que tu relises Bastiat.Effectivement si on arrête les ronds-points ça fera une tension sur l’emploi localement. Mais si tu baisses les impôts du même montant, tu vas rendre la somme aux contribuables qui vont la dépenser et cela créera de l’emploi ailleurs.

 

- Antoine -

Je vais le relire, une autre idée ?

 

- Auguste -

Il faut que tu demandes à ton Premier ministre de s’inspirer de la politique de Jean Chrétien au Canada. Le ligne à ligne.

 

- Antoine -

C’est de l’hébreu pour moi, c’est quoi le ligne à ligne ?

 

- Auguste -

Très simple, c’est demander à chaque service de de chaque ministère ce qu’il fait et combien ça coûte.

 

- Antoine -

Chaque service doit justifier ce qu’il fait, c’est ça que tu veux dire ?

 

- Auguste -

Exactement ! On se pose les questions suivantes : on arrête ?, on continue ?, est-ce qu’on peut faire différemment?, est-ce qu’on peut simplifier ? Je suis persuadé qu’une bonne partie du travail peut se discuter alors qu’on le continue par habitude.

 

- Antoine -

Au Canada qu’est-ce que cela a donné ?

 

- Auguste -

Dans chaque ministère, ils ont enlevé pratiquement 20 %. Il y avait 20 % qu’on pouvait très bien arrêter. Cela s’est très bien passé.

 

- Antoine -

Mais les gens qu’est-ce qu’ils ont fait ?

 

- Auguste -

Les gens se sont reclassés plus facilement qu’on ne croyait parce que la fonction publique est de qualité. Vois Jean Chrétien, il est à la retraite il sera ravi de tout t’expliquer en détail.

 

- Antoine -

Ça tombe bien, je vais faire un voyage au Canada, je vais demander de passer une après-midi avec lui, en le prévenant pour qu’il se prépare.

 

- Auguste -

L’autre chose qu’ils ont faite, c’est de ne pas remplacer ceux qui partaient en organisant des mutations d’un ministère à l’autre.

 

- Antoine -

Mais ce n’est pas simple, que fais-tu des compétences ?

 

- Auguste -

Cela demande de se reconvertir, mais on reste dans l’administratif. On ne passe pas d’un bureau à l’usine ou à un centre de recherche, cela reste globalement le même métier, c’est une affaire de formation, ce n'est pas la mer à boire.

 

- Antoine -

Tu as une autre idée comme cet excellent « ligne à ligne » ?

 

- Auguste -

Une autre idée consiste à pas remplacer les gens qui partent à la retraite ; cela fait des économies colossales si on organise bien les transferts.

 

- Antoine -

Toi qui aimes les ordres de grandeur qu’est-ce qu’on gagnerait ?

 

- Auguste -

Dis-moi simplement combien il y a d'agents publics.

 

- Antoine -

5 700 000

 

- Auguste -

Dans l’administration on travaille en gros pour 40 ans. Si tu ne remplaces pas (je calcule à grands coups de serpe) ça fait 140 000 par an (je divise 5 700 000 par 40).

 

- Antoine -

C’est fou ces raisonnements.

 

- Auguste -

Fais-les vérifier mais c’est l’ordre de grandeur. Qu’est-ce que tu crois ? C’est ce à quoi j’ai passé mon temps dans l’entreprise : on était en concurrence avec les meilleures entreprises du monde dans notre secteur, on était obligés tout le temps de faire ce genre de choses pour s’adapter. Entre nous, cela ne ferait pas de mal que l’administration s’inspire un peu des méthodes du privé.

 

- Antoine -

L’économie ?

 

- Auguste -

À 50 000 euros le fonctionnaire, c’est une économie de 7,5 milliards.

 

- Antoine -

Quand on t’entend tout a l’air simple !

 

- Auguste -

Il faut que tu vérifies, on va t’expliquer que ce n’est pas possible, il faut que tu tiennes bon. J’ai une idée. Si tu voulais marquer les esprits, il faudrait que tu fasses toi-même sur l’Élysée un geste fort.

 

- Antoine -

Lequel ?

 

- Auguste -

Tu devrais aligner les dépenses de l’Élysée de Matignon sur l’Allemagne. Tu sais combien coûte en Allemagne, la Présidence et le Chancelier ?

 

- Antoine -

Non je sais que l’Élysée c’est 125 millions et Matignon à peu près la même somme mais j’ai aucune idée de ce qu’on dépense en Allemagne pour les mêmes jobs.

 

- Auguste -

Reste bien assis, le Président fait avec 40 millions et le Chancelier, 30. Leur PIB est de 4 100 milliards d’euros, et le nôtre 2 800 ! Tu te rends compte ?

 

- Antoine -

Là j’ai le choc, je n’avais jamais fait la comparaison tu ferais quoi ?

 

- Auguste -

Je fais un petit calcul de tête, je proposais de diviser le budget de l’Élysée par deux sur cinq ans, ça fait du -15% par an pendant cinq ans à commencer dès l’an prochain.

 

- Antoine -

Je trouve que tu y vas un peu fort.

 

- Auguste -

Je vais te dire qu’on a intérêt à y aller fort. Le monde va rentrer dans une période extrêmement troublée. Il va falloir mettre beaucoup d’argent sur la Défense. Un geste comme ça, c’est une façon de faire passer le message à tout le monde. Rien que ce geste convaincrait des entreprises étrangères à venir en France, elles se diraientt « les Français, ils y vont ! ». Je vais être vache, ce serait plus efficace que les soirées à Versailles à 500 000 euros la soirée.

 

- Antoine -

Excuse-moi, tu fais Français moyen râleur !

 

- Auguste -

Je vais te dire, mon entreprise a connu plusieurs fois des moments difficiles, on s’en est tiré par des mesures comme celle-là. Si on ne l’avait pas fait, je n’aurais pas pu financer les études de tes parents et… tu ne serais peut-être pas là où tu es.

 

- Antoine -

Calme-toi grand-père ! Sache que tout ce que tu me dis m’est infiniment précieux. J’ai besoin de dormir dessus.À bientôt

Fin du chapitre 14. La suite, au prochain épisode...


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