| | Quand Elon Musk tord le bras des annonceurs américains… | | Depuis qu'il s'est installé en coworking dans la maison blanche, Elon Musk use de toute son influence pour contraindre les marques à revenir sur X, dont les recettes publicitaires ont été largement siphonnées après le rachat de la plateforme en 2022 par le nouveau « go-to guy » de l'administration Trump... Nous sommes en décembre dernier, environ un mois après la victoire de Trump à l'élection présidentielle américaine. Un avocat embauché par X décroche son téléphone et compose le numéro de l'un de ses confrères qui défend les intérêts du groupe Interpublic, l'une des plus grosses agences de communication outre-Atlantique. Il a un message à lui faire passer. Ou plutôt une menace : « Faites en sorte que vos clients dépensent plus d'argent sur le réseau social d'Elon Musk, ou sinon... » La scène est décrite dans l'intro de cet article du Wall Street Journal, qui cite plusieurs sources ayant eu connaissance de cette conversation. Et comme dans tout rapport de force qui prend cette tournure, une seule question se pose ensuite : sinon quoi ? Toujours selon le quotidien économique et financier, les dirigeants d'Interpublic auraient interprété ces propos comme une allusion directe à l'annonce, quelques jours plus tôt, d'une fusion entre leur groupe et celui d'Omnicom, troisième plus gros réseau d'agences de communication et de publicité mondial après Publicis et WPP. Un deal à 13 milliards de dollars que l'administration Trump pourrait décider de torpiller ou, du moins, de faire traîner en longueur pour faire plaisir à son nouveau ministre de « l'efficacité gouvernementale » : Elon Musk, qui n'en est pas à son coup d'essai en la matière... L'empire X contre-attaque Début août 2024, X a assigné en justice la World Federation of Advertisers (WFA) ainsi que plusieurs grandes marques comme Mars, Unilever ou la chaîne américaine de pharmacies CVS Health, les accusant d'avoir « illégalement » boycotté son réseau social pour le contraindre à se conformer aux standards de sécurité des marques définis par la WFA. Dans des documents judiciaires consultés par plusieurs agences de presse mondiales, WFA est accusée d'avoir, via son initiative appelée GARM (Global Alliance for Responsible Media), travaillé en sous-main avec ces groupes et d'autres, afin de « collectivement priver X de milliards de dollars de dépenses publicitaires ». Une manœuvre qui aurait entraîné l'appel d'air dans lequel de nombreuses marques se sont engouffrées par la suite. « Ils se sont entendus pour boycotter X, ce qui remet en cause nos capacités de développement à l'avenir. Aucun petit groupe de personnes ne devrait avoir la possibilité de monopoliser ce qui peut être monétisé », avait déclaré Linda Yaccarino, DG de X, dans une vidéo postée sur la plateforme. Ce que son boss avait tweeté en quelques mots dans son style bien à lui : « Nous avons tenté de régler cela pacifiquement pendant deux ans, désormais c'est la guerre. » Quelques semaines après l'assignation en justice, Unilever acceptait de reprendre la publicité sur X en échange de l'abandon des poursuites... Chantage, copinage et renvoi d'ascenseur Rebelote en novembre 2024 avec l'ajout au procès de Twitch, plateforme détenue par Amazon. Puis fin janvier dernier, avec d'autres grandes marques comme Nestlé, Lego, Pinterest, Colgate ou Shell. « Certains des annonceurs avec lesquels nous travaillons ont exprimé le sentiment qu'il existe une menace implicite de la part de X selon laquelle ils pourraient être ajoutés au procès s'ils ne reviennent pas sur le réseau social », insiste Ruben Schreurs, CEO d'Ebiquity, un cabinet de conseil qui bosse avec de nombreux annonceurs, dans les colonnes du Wall Street Journal. Depuis qu'Elon Musk fait la pluie et le beau temps dans le Bureau ovale – parfois même avec son fils X sur les épaules –, il existe également une réelle inquiétude quant au fait que ne pas revenir sur X pourrait avoir de graves impacts commerciaux pour les frondeurs assumés. Résultat de ce chantage supposé, car à peine dissimulé : plusieurs multinationales comme Amazon ou Apple (dont les PDG étaient présents aux côtés d'Elon Musk lors de l'investiture de Trump) ont déjà repris leurs investissements. Et d'autres marques, comme Verizon, le géant des télécoms, pourraient suivre. Tout comme les agences de communication. Toujours selon les sources du quotidien américain, le groupe WPP négocierait actuellement son retour en grâce et Publicis serait, lui aussi, en passe de signer un « pacte annuel non contraignant ». Hasard ou coïncidence : on apprenait dans le même temps que X et Trump étaient parvenus à un accord pour mettre fin au (long) procès intenté par le président américain suite à la suspension de son compte après l'attaque du Capitole en janvier 2021. Un deal à hauteur de dix millions de dollars, versés par Elon à Donald en guise de dédommagement. Soit quinze de moins que l'accord similaire conclu avec Mark Zuckerberg le mois dernier, pourtant ouvertement pro-Trump suite à son retournement de veste de dernière minute symbolisé par, entre autres joyeusetés, l'abandon du fact-checking sur les réseaux de Meta. Une belle leçon de clientélisme, en somme. | | | | ET SINON... (Ça bruisse dans la jungle) | À l'heure où Meta déploie les « community notes », qu'Elon Musk promet de les « réparer » sur X sous prétexte que ce système est « truqué par les gouvernements et les médias », et qu'OpenAI annonce également sa volonté d'assouplir la modération sur ChatGPT, Bodyguard, entreprise spécialiste de la modération en ligne, fait état d'un bond de 22,7% des messages jugés haineux sur Facebook (20,8% sur Instagram) depuis le 7 janvier et l'arrêt immédiat du fact-checking. Sur les deux plateformes, la catégorie en plus forte hausse est le harcèlement moral (+80% en moyenne), suivie de près par les messages ayant trait au terrorisme (+61% sur Facebook). Au passage, Meta va très bien, merci pour elle. Grâce au développement de Meta AI, son IA générative qui permet de produire des images, des textes et des vidéos, elle connaît une croissance exponentielle de ses revenus publicitaires depuis fin 2024. Ses nouveaux outils sont désormais utilisés par plus de quatre millions d'annonceurs (contre un million il y a quelques mois) et les campagnes Advantage+, permettant de lancer des campagnes automatisées grâce à l'IA, ont notamment connu une croissance de 70% en 2024, générant un revenu annuel supérieur à vingt milliards de dollars. D'ailleurs, X sort aussi sa gamme d'outils permettant l'automatisation des campagnes publicitaires sur sa plateforme. Grâce à l'option « Prefill with Grok », il suffit d'entrer l'URL de votre site ou d'une page produit et Grok – l'IA made in « Muskland » – se charge de vous concocter une campagne clé en main. Simple comme bonjour. De quoi inciter d'autres annonceurs, plus modestes, à faire eux aussi leur retour sur la plateforme honnie ? Déjà disponible aux USA depuis 2023, TikTok Shop déboule officiellement en France. S'il faut encore attendre avril prochain pour que vous puissiez faire vos achats sur ce pendant e-commerce de l'appli vidéo, les entreprises françaises, elles, peuvent déjà s'inscrire sur la plateforme en tant que vendeurs. Avec près de 1,5 milliard d'utilisateurs actifs sur TikTok dans le monde, ça fait un paquet de clients potentiels. Cette année, outre Oupette, la vache limousine nommée égérie de cette édition 2025, les stars du Salon de l'agriculture – qui referme ses portes ce dimanche 2 mars – sont clairement les influenceurs. À en croire cet article des Echos, d'Inoxtag (avec Danone) à Samuel Étienne, Bastien Stervio (aggriyoutubeur aux quasi 500 000 abonnés) et Maria Moreno (mariappymeal sur Insta) sur le stand d'Intercéréales, ils sont devenus l'arme préférée des lobbys agroalimentaires. Miam ! | | UN FORMAT À LA LOUPE | | Selon une étude menée par le cabinet de conseils Crowd DNA, 40% des internautes utilisent les recommandations des Creators sur Instagram lorsqu'ils réalisent des achats. Un chiffre qui doit être placardé un peu partout dans les salles de réunion d'Instagram, puisque le réseau social à l'appareil photo continue d'étoffer son offre pour les créateurs de contenu en mettant un nouvel outil de monétisation à leur disposition : les « Témoignages » (« Testimonials » en VO). Un nouveau type de co-publicité entre eux et les marques. Jusqu'ici, pour monétiser leurs posts, les créateurs avaient la possibilité de créer du contenu original pour une marque ou d'autoriser la sponsorisation d'un post existant. Désormais, une troisième option s'offre à eux : faire sponsoriser un « témoignage ». De courts messages promotionnels composés uniquement de texte, rapides à réaliser et qui, in fine, renforcent le sentiment d'authenticité. | | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | Un métro comme décor, un pass Navigo en guise de micro et une mini interview qui s'articule autour d'une punchline. C'est le concept développé dans Subway Takes, où Kareem Rahma donne la parole à des célébrités autant qu'à d'illustres inconnus entre deux arrêts de métro. Tournées depuis 2019 à New York, Londres, ou ici à Paris avec l'humoriste Fary, ces vidéos courtes (environ trente secondes) cartonnent sur Instagram, TikTok et YouTube ! Le résultat d'un travail de longue haleine pour ce créateur de contenu américain d'origine égyptienne qui n'avait qu'un seul problème pour devenir célèbre : son âge. « 33 ans, c'est très long en années new-yorkaises, s'amuse-t-il dans les colonnes du Guardian. Je savais que je devais mettre à profit dix ans de travail en seulement cinq ans parce que je suis en compétition avec des gamins de 23 ans plus drôles et bien meilleurs que moi. Mais j'ai aussi une chose qu'ils n'ont pas : la perspective... » Un style de dandy cool et décontracté, aussi. | | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | À ceux pour qui ce nom n'évoque que de nombreuses scènes iconiques de la série Breaking Bad, non, Heisenberg n'est pas que le pseudo du personnage joué par Bryan Cranston... C'est surtout le nom de l'homme qui jeta les bases de la physique quantique dès 1925, il y a tout juste 100 ans, avant de jouer un rôle trouble dans le programme nucléaire de l'Allemagne nazie. De la découverte à seulement 23 ans des mystérieuses équations qui régissent le mouvement des électrons à l'intérieur des atomes, à sa mort en février 1976 à Munich, en passant par sa collaboration avec Niels Bohr (aka « le pape de l'atome ») et ses querelles avec Albert Einstein, qui réfutait leur interprétation de la théorie quantique, sa vie, son œuvre, sont au centre de Heisenberg : Naissance de la mécanique quantique. Magistralement réalisé par Laure et Hugo, « deux scientifiques vidéastes, nourris au cinoche et aux équations », qui apprécient « autant les chocs esthétiques que les démonstrations rigoureuses », ce documentaire en trois parties, à mi-chemin entre Un jour, un destin et Faites entrer l'accusé, est à retrouver sur leur chaîne YouTube : Photons Jumeaux. |
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