Quibi : vraiment court Tweets, gifs, stories, TikTok, Reels : les millennials et les Gen Z raffolent des contenus courts. Alors comment expliquer l'échec spectaculaire de Quibi, service de streaming haut de gamme de vidéos courtes, six mois seulement après son lancement ? Ultramédiatisée du fait de son propriétaire iconique, Jeffrey Katzenberg, cofondateur avec Steven Spielberg de DreamWorks, la jeune pousse a annoncé ce mercredi 21 octobre qu'elle tirait sa révérence et revendait son catalogue d'actifs . Pandémie mondiale, domination écrasante de Netflix et consommateurs volages : il faut dire que les obstacles étaient nombreux pour cette start-up hollywoodienne. Mais, au-delà de ce contexte particulier, que retenir de ce revers ? À partir de quel moment cette météorite quatre étoiles screwed up, malgré les talents, l'argent, les contacts haut de gamme et les contenus premium investis (1,75 milliard de dollars avait été mis sur la table !) ? Quibi est resté dans son coin« Quibi se considère comme un studio de cinéma. Elle doit se considérer comme un réseau social », argumente Ravi Mehta, ancien chef de produit chez Tinder, Facebook, TripAdvisor et Xbox. Difficile d'adapter une pensée hollywoodienne – fondée sur le mystère et l'inaccessibilité – au nouveau monde du divertissement, direct et engageant. L'expérience Quibi se fait en solitaire, sur son écran, sans interaction avec quelques autres fidèles. Les captures d'écran sont rendues impossibles. Seul au monde. Le public n'est pas pris en compte dans le processus de création. « Quibi a fait l'erreur de penser que "court" était ce que les spectateurs attendaient, alors qu'ils sont en réalité à la recherche d'expériences partageables et sociales, poursuit Ravi Mehta. Les snack contents sont amusants puisqu'ils peuvent être partagés. » « Le contenu est une conversation à double sens »
D'où le succès des plateformes consœurs : Twitch, YouTube, Instagram, TikTok. « Vivantes », elles se bâtissent sur les réactions, commentaires, imitations, expériences qu'elles suscitent. « Aujourd'hui, le contenu est une conversation à double sens. La ligne de démarcation entre le public et le créateur s'estompe », commente l'ancien chef de produit. TikTok, tout comme Instagram, a adopté cette logique de média vivant – une place de village virtuelle où l'on peut échanger, regarder, imiter, partager et remixer – à grands renforts d'animations sophistiquées et de chiffres d'engagement prometteurs. Rappelons que l'algorithme de TikTok est conçu pour donner aux nouveaux contenus une belle chance de viralité. Les raisons invoquées dans la lettre adressée par Meg Whitman, ex-patronne de Hewlett-Packard Enterprise, et Jeffrey Katzenberg à leurs équipes mercredi évoquent une conjoncture malheureuse entre la crise sanitaire et une idée pas assez solide pour « justifier un service de streaming tenant debout par lui-même » : l'heure est à une meilleure compréhension des usages de consommation. « La disparition de Quibi ne sonne pas le glas de la vidéo courte de qualité. Mais elle montre bien le défi que représente la création d'une entreprise fondée sur des émissions de télévision de qualité », conclut Digiday.Pour les curieux, un thread existe pour mieux comprendre les raisons de la défaite de Quibi. Un échec qui n'est pas sans rappeler celui de Canal+ avec Studio+, son service de vidéos courtes, en 2018 – qui a dû se solder par 48 millions d'euros de pertes ! | JUNGLE STORIES | | | UN PAVÉ DANS LA JUNGLE | Ça tangue dans les médias américains ! Elon Musk supprime le service de presse de Tesla, sa marque de voitures électriques. Son meilleur canal ? Son compte Twitter aux 39 millions d'abonnés, où il peut s'exprimer sans filtre. « À l'ère du numérique, si une entreprise a un bon produit et des adeptes enthousiastes, l'idée d'un département en charge des relations publiques est obsolète », avance Trip Chowdhry, analyste chez Global Equities Research. Plus besoin de médias et de leurs critiques pour assurer sa com. « Les puissants n'ont plus besoin de la presse grand public, en particulier des organes critiques et éthiques comme le "Washington Post" », prévient Hamilton Nolan, son public editor. Pourquoi c'est un pavé ? Les rapports de force s'inversent. « Nous vivons un changement historique, alimenté par la technologie, dans l'équilibre des pouvoirs entre les médias et les sujets qu'ils traitent. Les sujets gagnent », poursuit Hamilton Nolan. La presse n'est plus considérée comme l'inébranlable chien de garde de la démocratie. Ce que confirme l' enquête du Pew Research Center, menée auprès de 13 000 personnes et parue le 28 septembre. Pour s'informer, les Américains se tourneraient autant vers des chaînes indépendantes sur YouTube que vers les médias classiques. Autant dire que les théories du complot ont de beaux jours devant elles... Pour le « Washington Post », une seule solution : « Mettre métaphoriquement la tête des gens puissants sur des piques. » Voilà voilà. Comprenne qui pourra... | UN FORMAT À LA LOUPE | | | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | | LE CONTENU QU'ON A AIMÉ FAIRE | Stratégie, tactique, charte éditoriale ... comment s'assurer que chaque contenu produit par la société, par le groupe, contribue à installer la plateforme de marque, sa stratégie de contenus ? Retrouvez notre webinaire sur le sujet, où Story Jungle partage son expertise dans l'établissement de content playbooks acquise auprès de sociétés de différentes tailles, de grands groupes du CAC 40 à des start-up. | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | Le journalisme, en particulier au plus haut niveau, est une question de pouvoir brut. Aussi palpitant que « Borgen » ou « Le Baron noir », le podcast « Mécaniques du journalisme : l'affaire Cahuzac » , diffusé sur France Culture, dévoile les coulisses de l'enquête de longue haleine menée par Fabrice Arfi, journaliste à « Médiapart ». En quatre épisodes d'une dizaine de minutes, il explique comment il a découvert que le ministre du Budget de François Hollande possédait un compte bancaire non déclaré en Suisse. Une révélation qui conduira à la démission de Jérôme Cahuzac en mars 2013. Quelques anecdotes cocasses essaiment le récit : c'est au prix d'une soirée d'ébriété « et de quelques verres d'armagnac » qu'il obtiendra – de la part d'un tiers – un enregistrement déterminant pour l'enquête. On retiendra surtout l'intuition et la ténacité d'un journaliste, déterminé à lever le voile sur des affaires politiques douteuses, face à un Jérôme Cahuzac dans le déni. Pour l'homme déchu, comme il le disait alors au téléphone à « Médiapart », ces révélations s'apparentaient « à regarder sous les jupes de [sa] fille pour voir si elle est encore vierge ». Euh... |
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