Judith Nuvita, ou Kualekañ, de son nom kagaba, est dentiste. Première femme kogi à avoir suivi des études universitaires, elle a choisi de revenir exercer son métier au sein de sa communauté.
Après une semaine de formation et d’échanges de pratiques en dentisterie dans la Drôme, Judith a donné une série de conférences, à Bruxelles, Paris, Lille et Genève. Devant un public nombreux, elle a abordé différents thèmes : la coopération ; le tissage, pratique essentielle chez les peuples de la Sierra Nevada de Santa Marta ; l’eau, élément féminin à l’origine de la vie… Et bien-sûr, les dents ! "J’étais surprise de voir comment les connaissances traditionnelles des Mamas Kogis résonnent avec vos savoirs scientifiques. C'est ce que j'ai découvert en faisant mes études universitaires. Ce que je ne sais pas, c'est comment mes ancêtres ont fait pour savoir cela ?"
C’était son premier séjour en Europe. Nombre de nos habitudes l’ont interpellée : la frénésie des grandes villes, la déconnexion à la nature, ou les nombreux tunnels, que les Kogis voient comme une agression contre la Terre Mère…
Mais pour Judith, "Au-delà de nos langues et nos cultures, qui sont différentes, nous avons tous la même origine, la même histoire. C'est ensemble et dans le dialogue que nous trouverons le chemin. Nos anciens disent qu’un jour nos "Petits Frères" aux yeux verts vont venir protéger nos territoires, et je crois que c’est maintenant”.

A 32 ans, Ruperto, de son vrai nom Guajarin, est un Amérindien Arhuaco des deux mondes, moderne et traditionnel. Originaire d'une vallée préservée, au sud de la Sierra Nevada de Santa Marta, il a effectué deux années de sociologie, puis d'économie, avant d'étudier les philosophes grecs à Bogotá, sans jamais renoncer à sa culture. Après sept ans passés chez Miscrosoft, "non pas comme porteur de cafés, comme me demandent les gens, mais comme responsable commercial grands comptes, puis porteur de projets pour la paix", il s'est lancé dans le développement d'une entreprise de café, pour tenter de commercialiser "le café traditionnel et spirituel de notre communauté d'une autre façon". Et de commenter : "Il n'existe pas de mots, de concepts, pour désigner la façon dont nous cultivons et travaillons le café. Cela ne rentre dans aucune de vos cases, il faut tout réinventer". Invité à témoigner lors de la convention APM (Association Progrès du Management) qui s'est tenue à Annecy en septembre dernier, il a souhaité aller "saluer et remercier le Mont Blanc", d'après lui, montagne mère d'Europe. "Vous prenez sans arrêt, vous prenez tout, mais vous ne pensez jamais à rendre" a-t-il partagé aux participants de la convention APM, étonnés et curieux de ce nouveau regard sur le monde proposé par Guajarin.