Après avoir sondé à deux reprises le gouffre où se façonnent les formes humaines (Et toujours les forêts, Ces orages-là), Sandrine Collette creuse encore plus profondément dans On était des loups, en librairie le 24 août. Au cours de l’équipée sauvage d’un homme ravagé par le chagrin et de son jeune fils, la romancière se place au plus près du souvenir de notre animalité et questionne notre être fondamental au monde. Liam est l’homme qui n’a pas vu l’ours. Et pourtant, il en connaît un rayon, lui, l’homme des bois, le taiseux, qui nous parle d’un autre temps d’une voix pâle et brute. Il raconte : sa forêt, sa montagne, sa famille, leurs besoins primaires et leur manière d’y subvenir, ceux qu’il voit débarquer, cherchant refuge en marge des sociétés sur une terre en désolation et qu’on appellerait aujourd’hui des « néo-ruraux », mais qui rebroussent vite chemin face à des conditions façonnées par une nature de plus en plus hostile, à peine futuriste.
Se souvenir de notre être animal
Liam est l’homme qui n’a pas vu l’ours, donc. C’est sa femme, Ava, qui a été happée par la grosse patte, protégeant son petit garçon de son corps. Le voilà, Aru, quand Liam rentre ce soir-là, vif mais couvert du sang de sa mère, recroquevillé sous son flanc. Liam n’écoute que son instinct de loup presque solitaire et saute à cheval, empêtré de sa douleur et d’un gosse qu’il connaît à peine et dont il ne perçoit que les tares dues à son jeune âge. Seuls les smartphones qui se lèvent sur l’autoroute pour « instagrammer » les deux drôles de cavaliers signalent que nous ne sommes ni à la préhistoire ni au far west. Et pourtant, à peine les dernières lueurs des villes derrière eux, la menace gronde comme venue d’un âge aussi lointain que les pierres. Ne pourrait-elle jaillir de ce père dévasté et démuni face à cette petite tête blonde ? Que faire d’un enfant dans un monde qui n’est pas fait pour une frêle créature et dont la nature ne ferait qu’une bouchée si on le laissait là, tout seul, au bord d’un ravin ? Quel sens cela a-t-il de le maintenir en vie à tout prix… ?
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