Taxe foncière : un impôt injuste et complexe à réformer de toute urgence

 

Par Olivier Bertaux, expert fiscaliste de Contribuables Associés

 

La Cour des comptes publie un nouveau rapport sur la taxe foncière, mettant en exergue tous les paradoxes de cet impôt et réitérant une fois de plus ses défauts.

 

Ainsi, la juridiction insiste sur la nécessité d’asseoir enfin la taxe sur une base d’imposition réelle et non plus fictive.

 

L’assiette étant constituée sur une valeur locative censée correspondre au rendement du bien en cas de location mais selon une estimation datant des années 1960, elle est désormais totalement déconnectée de toute réalité économique.

 

Le rapport déplore donc le retard pris dans la révision des valeurs locatives, le chantier étant sans cesse décalé.

 

Il est vrai que son résultat sera explosif puisqu’il remettra en cause à la fois les montants de taxe foncière dus par chaque foyer, en plus ou en moins d’ailleurs, mais aussi l’équilibre même des finances publiques locales puisqu’une taxe basée sur la valeur locative réelle de l’immeuble impliquera forcément plus de recettes pour les communes déjà riches et moins de rentrées pour celles déjà pauvres.

 

Quoi qu’il en soit, les atermoiements sur cette réforme pourtant nécessaire démontrent la fragilité de notre système actuel de fiscalité locale.

 

Impôts fonciers : la France détient le record

 

Autre information importante qui ressort du rapport, la charge incombant aux ménages dans le financement des collectivités locales.

 

Ainsi, la France détient le record de la part des impôts fonciers incombant aux ménages : 72%, le reste étant dû par les entreprises ou les collectivités.

 

Les 35 milliards d'euros de taxe foncière reposent donc essentiellement sur les particuliers. Par comparaison, ce taux descend à 40% pour l’Allemagne et s’avère quasiment nul pour des pays comme l’Italie ou l’Espagne.

 

En outre, la Cour des comptes insiste sur le fait qu’avec la disparition de la taxe d’habitation sur les résidences principales, la fiscalité locale pâtit désormais d’une décorrélation accrue entre le citoyen et sa collectivité.

 

Seuls les propriétaires payent la taxe foncière au profit de collectivités dans lesquelles ils n’habitent pas forcément et dont les dépenses leur sont donc forcément étrangères.

 

Surtout, leur taxe foncière ne dépend que d’une valeur théorique du bien, sans lien avec sa valeur réelle mais surtout sans lien avec leurs revenus et sans lien avec les prestations attendues de la collectivité.

 

Cette déconnexion est telle qu’aujourd’hui une ville comme Grenoble, dont le taux de taxe foncière est déjà un des plus élevés, arrive encore à justifier une hausse de 25 % en avançant que celle-ci reste largement inférieure à l’économie de taxe d’habitation réalisée par les habitants depuis sa disparition.

 

La ville oublie juste de préciser que les contribuables des deux taxes ne sont pas les mêmes, et surtout que la commune est indemnisée par l’Etat de la disparition de la taxe d’habitation grâce au reversement d’autres impôts nationaux comme la TVA.

 

Un mode de calcul inextricable

 

En fait, le rapport met le doigt sur un tel niveau de complexité atteint par la taxe foncière que personne n’y comprend plus rien.

 

La Cour des comptes relève ainsi 91 dispositifs existants d’abattement, exonération ou dégrèvement, créant un mode de calcul inextricable de la taxe pour en déterminer son rendement réel et son impact sur la population ou l’économie d’une ville.

 

La Cour note aussi que la taxe foncière, comme tout impôt local français, revêt cette particularité d’être payée au profit d’une collectivité locale mais gérée et prélevée par l’Etat qui, pour cela, se fait rémunérer tout en prenant en charge certains des dégrèvements.

 

Au bout du compte, on s’aperçoit que ces frais de gestion et de prélèvement sont particulièrement élevés pour le contribuable sans qu’il soit pour autant possible de déterminer qui y gagne finalement entre le contribuable, la commune et l’Etat.

 

Rien que cette opacité même involontaire laisse entendre qu’entre l’argent versé par le contribuable et celui investi dans les services locaux, la déperdition est incontestable.

 

Complexité et opacité entraînent une inévitable méfiance du contribuable. D’autant que l’efficacité du recouvrement est impressionnante et atteint 99,8% !

 

Dès lors, les contentieux se multiplient pour représenter près de 20% de tous les contentieux fiscaux, les dégrèvements obtenus tant d’office qu’après réclamation ou recours juridictionnel atteignant pour leur part plus de 500 millions d'euros par an.

 

Autant dire que la taxe foncière est un impôt qui rapporte mais qui fâche également. 

 

Dès lors, pourquoi ne pas réfléchir à une réforme ambitieuse des impôts locaux qui redonnerait aux territoires leur autonomie et pouvoir de décision, en leur octroyant la possibilité de créer des ressources qui ne dépendraient plus d’un tas de pierre ou de béton impossible à évaluer mais du potentiel réel des ménages qui s’y installent ou des entreprises qui y investissent.

 

Source : Les taxes foncières, Cour des comptes, 27 février 2023

 

 

Signez la pétition ici !

Les informations vous concernant font l’objet d’un traitement informatique destiné à l’envoi de newsletters d’information, d’emails d’appels à signature de pétitions et/ou d’emails afin de collecter des dons. Vos données sont conservées en conformité avec les directives de la CNIL. Conformément à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée et au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, de portabilité et d’effacement de vos données ou encore de limitation de traitement, en écrivant à Contribuables Associés - 13 Rue du Quatre-Septembre – 75002 Paris | contact@contribuables.org .


‍Pour ne plus recevoir nos publications, cliquez ici

 



Statistics image