La lettre des pouvoirs de L’Express, 7 novembre 2024 | |
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le Parti pris | Un agent double entre France et Iran | | par Etienne Girard Rédacteur en chef du service société @girard_etienne Tout a commencé par un chantage. Au milieu des années 1980, Matthieu Ghadiri, né Mohamad, étudiant iranien à Paris, voit débarquer dans le vidéoclub où il travaille un policier de la Direction de la surveillance du territoire (DST), le contre-espionnage français. Il veut des informations, sans quoi sa demande de naturalisation sera refusée. Le début d’un jeu de poker menteur long… de près de quarante ans, que Ghadiri détaille dans Notre espion iranien (Nouveau Monde), un récit renversant - et parfois tragi-comique - dans les coulisses très secrètes du renseignement français, coécrit avec le journaliste Stéphane Johany, à paraître ce mercredi 6 novembre. Animé du désir de rester en France, le jeune homme se révèle un bluffeur de talent. Il démarche les services secrets irakiens, glane quelques tuyaux, puis s’attaque à sa mère patrie, jamais revue depuis son départ à 17 ans, en 1977. Les espions iraniens le convoquent à Bonn puis à Téhéran, lui donnent plusieurs missions d’infiltration, dans la diaspora et au sein du Parti socialiste que Ghadiri a intégré quelques années auparavant. Certaines de leurs cibles, membres de l’opposition monarchiste, finiront assassinées. Comme tout agent secret, l’étudiant dispose alors d’une couverture pour justifier ses démarches : il exerce comme avocat – en fait, il n’a pas le diplôme – spécialisé dans l’aide aux étrangers. A chaque mission iranienne, Matthieu Ghadiri rend compte au renseignement français. Il est devenu agent double. Deux inspecteurs de la DST clairvoyants ont succédé au maître-chanteur : Matthieu Ghadiri devient français pour services rendus en octobre 1989. L’agent double est tellement doué qu’on l’intègre à la police, alternativement comme infiltré auprès de trafiquants de drogue et comme traducteur de persan. Après avoir failli être tué par un commando iranien à Paris, il officie plusieurs années dans un centre d’écoutes, près des Invalides, d’où l’on vient le sortir régulièrement pour qu’il joue un baron de la drogue. Sa "légende" auprès des criminels qu’il est chargé de duper ? Celle d’un trafiquant libanais. Le tout… pour un peu plus de 1 000 euros par mois : on lui fait signer des CDD à l’infini, sans augmentation à l’ancienneté, jusqu’à ce qu’un article dans la presse sur "ces flics d’élite qui n’ont pas le smic" ne pousse Lionel Jospin à exiger leur titularisation, en 2002. En 2008, il découvre le monde des ambassades comme agent de liaison spécialisé dans les affaires de stupéfiants, en Turquie puis en Bulgarie, où il couvre l’interpellation étrange de quatre agents de la DGSE, dont deux sont blessés par balles. In extremis, les espions sont libérés après un échange entre Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, et son homologue. "Ça aurait pu être un Rainbow Warrior 2 !" sourit aujourd’hui Matthieu Ghadiri. Le policier, désormais à la retraite, nous a donné rendez-vous dans un café. En costume-cravate, ce sexagénaire chaleureux ne cesse de clamer son amour de la France. Il aurait pourtant quelques raisons d’en vouloir à sa nation d’adoption, et pas seulement à cause des menaces du policier du vidéoclub : en 2018, il manque d’être emprisonné en Iran, où il s’est rendu pour rendre visite à sa nouvelle compagne, sans que les diplomates de l’ambassade ne l’aident efficacement. Cette fois, ce sont les agents du renseignement iranien qui l’intimident : il faut qu’il collabore avec eux, sinon c’est la prison. Le bluffeur professionnel s’en sort par un dernier mensonge, et promet de les recontacter une fois en France. A son arrivée à l’aéroport, la DGSI le suspecte, mais la DGSE, elle, veut bien jouer avec les Iraniens, tenter de manipuler les manipulateurs. Mais sans risquer le diable. En 2023, les espions de Téhéran proposent un rendez-vous à Beyrouth, le renseignement extérieur français refuse, mieux vaut rester dans l’Union européenne. "Ils ont proposé Amsterdam, mais mon contact iranien m’a fait savoir qu’il n’avait pas pu obtenir le visa", nous raconte Matthieu Ghadiri. Epilogue d’une carrière de duplicité… au service de la France. | |
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Quand le PS ne voulait pas de Lucie Castets C’était une époque où personne ne la connaissait vraiment, pas même Olivier Faure… Fin 2023, Raphaël Glucksmann mijote sa liste pour les élections européennes à venir. Un moment de tension entre lui et le Premier secrétaire. Ce dernier a plusieurs noms socialistes à intégrer dans la liste, des personnes à récompenser autant que des adversaires internes à intégrer pour apaiser les conflits au sein du PS. Mais le leader de Place Publique veut embarquer avec lui des personnalités issues de la société civile, à des places éligibles il va sans dire. Glucksmann a deux noms en tête : Thomas Pellerin-Carlin, un spécialiste de la politique européenne de l’énergie et du climat de l’Institut Jacques Delors et une certaine Lucie Castets. Elle et lui auront même une discussion sur le sujet et notamment leurs ambitions partagées de service public européen. La direction du PS fait la mou, biffera son nom, lui préférant alors ses propres élus qu’elle ne souhaite pas faire perdre. | > Retrouvez les indiscrets de L'Express |
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| L'entretien de la semaine |
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