USA vs TikTok : le compte à rebours est lancé… | | En votant une loi qui vise à bannir TikTok sur son sol, le Congrès américain a déclenché la colère des 170 millions d'utilisateurs que compte le pays et allumé un début d'incendie diplomatique avec la Chine... À situations désespérées, mesures désespérées. Mercredi dernier, quelques heures seulement après l'adoption par la Chambre des représentants d'un texte faisant planer l'interdiction du réseau social outre-Atlantique, Shou Zi Chew, CEO de TikTok, a exhorté les 170 millions d'utilisateurs américains à se faire « entendre » dans une vidéo face caméra digne d'un discours électoral : « Cela priverait les créateurs et les petites entreprises de millions de dollars, mettrait en danger plus de 300 000 emplois américains et surtout vous priverait de votre TikTok ! » Des créateurs comme pearlmania500 (2,5 millions de followers sur TikTok), qui a suivi la consigne du boss et hurlé sa colère dans une longue vidéo déjà vue près de six millions de fois : « Aujourd'hui, 352 membres du Congrès ont voté pour interdire TikTok (contre 65, ndlr), soit 81% d'entre eux. J'aimerais que vous réfléchissiez à la dernière fois où 81% de notre Congrès est parvenu à s'entendre sur quoi que ce soit... » TikTok, TikTok... Boum ! À même pas huit mois de l'élection présidentielle, c'est peu dire que l'affaire enflamme l'Amérique. Certes, le texte de loi doit encore passer par le Sénat – où la partie semble loin d'être gagnée –, mais le président Biden a d'ores et déjà annoncé qu'en cas de vote favorable, il le promulguerait sous le nom de « Protecting Americans from Foreign Adversary Controlled Applications Act » (ou « loi sur la protection des Américains contre les applications contrôlées par des adversaires étrangers » en VF). À l'autre bout de l'échiquier politique, Donald Trump, son adversaire dans la course à la Maison Blanche, avait déjà pris position le 7 mars via son compte sur Truth Social, le réseau social qu'il a lui-même créé : « Si vous vous débarrassez de TikTok, Facebook et "Zuckerschmuck" doubleront leur chiffre d'affaires. Je ne veux pas que Facebook, qui a triché lors des dernières élections, fasse mieux. Ils sont de véritables ennemis du peuple. » Des propos réitérés depuis dans une interview accordée à la chaîne CNBC où il précise qu'il avait pris un décret similaire en août 2020, à l'époque refusé par le Congrès, mais qu'il n'avait pas trop forcé car « c'est une décision très difficile. Il y a beaucoup de monde qui adore TikTok et il y a plein de jeunes qui deviendraient fous sans ça ! Il y a beaucoup de bonnes et de mauvaises choses, mais ce qui me déplaît, c'est que sans TikTok, vous allez faire grossir Facebook, qui est pour moi un ennemi du peuple, comme une bonne partie des médias... » Make TikTok great again De son côté, Mike Gallagher, représentant républicain qui a présenté la proposition de loi au Congrès, lançait dans un communiqué : « Voici mon message à TikTok : rompez avec le Parti communiste chinois ou perdez l'accès à vos utilisateurs américains. Le principal adversaire de l'Amérique n'a pas à contrôler une plateforme médiatique dominante aux États-Unis. » Car c'est là que réside toute la subtilité de ce jeu d'influence entre superpuissances... « Ce texte n'interdit pas TikTok, tempère Hakeem Jeffries, patron des démocrates à la Chambre des représentants. Il vise à résoudre des questions légitimes de sécurité nationale et de protection des données liées aux rapports du Parti communiste chinois avec un réseau social. » En d'autres termes, si cette loi venait à passer, elle obligerait ByteDance, la maison mère chinoise, à céder TikTok US à une entreprise américaine dans les six mois, sous peine de n'être plus distribuée sur les plateformes de téléchargement d'Apple et Google. Et lorsqu'on connaît le prix de l'activité américaine de la plateforme, estimé entre 35 et 40 milliards de dollars selon le Bloomberg Intelligence Podcast, il y a de fortes chances que les GAFAM se portent acquéreurs (bien qu'un tel scénario pourrait tomber sous le coup des lois antitrust américaines). Le New York Times fait également état de plusieurs repreneurs déclarés comme Steven Mnuchin, l'ex-secrétaire au Trésor de l'administration Trump, ou Bobby Kotick, l'ancien boss d'Activision Blizzard. « Des méthodes de voyou ! » Outre d'éventuelles fuites de données sensibles, le gouvernement américain s'inquiète de l'influence que la Chine pourrait exercer sur la prochaine présidentielle, à l'instar des ingérences attribuées aux hackers russes lors des élections de 2016. D'autant que, selon une étude du Pew Research Center, 14% de la population américaine déclare s'informer régulièrement sur TikTok (32% chez les 18-29 ans !). Des accusations d'espionnage et de manipulation que le réseau social réfute farouchement, arguant que les données de l'Oncle Sam sont déjà hébergées par des serveurs situés sur le sol américain et gérés par Oracle, une société basée au Texas. La plateforme a même incité ses utilisateurs à faire pression sur leurs représentants au Congrès en noyant leur permanence sous les appels téléphoniques. Et Pékin appuie la rhétorique. « Si un soi-disant prétexte de sécurité nationale peut être utilisé pour écarter arbitrairement des entreprises performantes d'autres pays, alors il n'y a plus d'équité ni de justice, a prévenu Wang Wenbin, porte-parole de la diplomatie chinoise, en conférence de presse. Quand quelqu'un voit une bonne chose d'une autre personne et veut la lui prendre, ce sont assurément des méthodes de voyou ! » | | | | UN PAVÉ DANS LA JUNGLE | « Nous nous engageons à soutenir le journalisme en lui apportant les nouvelles technologies liées à l'IA et en améliorant les opportunités pour les créateurs de contenus. En nous associant avec Le Monde et Prisa Media, notre objectif est de permettre aux utilisateurs de ChatGPT à travers le monde de se connecter à l'actualité de façon plus interactive et instructive. » D'entraîner ses futurs modèles d'IA avec les contenus des deux groupes de presse français et espagnol, aussi. Mais ça, le communiqué d'OpenAI dans lequel intervient Brad Lightcap, son COO, ne le mentionne que très brièvement. Pourquoi c'est un pavé ? Après Axel Springer en décembre 2023, ce sont donc Le Monde et Prisa Media (El País, Cinco Días, As, et l'édition ibérique du Huffpost) qui sont désormais liés à OpenAI par un contrat dont le montant est tenu secret. Accord que le quotidien français voit comme « un premier dispositif de protection de notre travail et de nos droits, alors que nous n'en sommes encore qu'au tout début de la révolution de l'IA, une vague annoncée comme plus imposante encore que celle du numérique par de nombreux observateurs », dans une tribune signée par Jérôme Fenoglio et Louis Dreyfus, respectivement président et président du directoire du Monde). « Nous espérons que cet accord marquera un précédent pour notre secteur, poursuivent-ils. Avec cette première signature, il sera plus difficile pour les autres plateformes d'IA d'esquiver ou de refuser toute négociation. De ce point de vue, nous sommes convaincus que cet accord est bénéfique pour l'ensemble de la profession. » Sauf que ce point de vue est loin de faire l'unanimité. Certains groupes, comme le New York Times, ont d'ailleurs choisi la voie du procès pour violation du droit d'auteur, et de nombreux journalistes s'inquiètent déjà des éventuelles dérives. C'est le cas de Benoit Raphael, fondateur de Flint – un média dopé à l'IA générative – et ancien membre de la rédaction du Monde : « Ces accords vont se multiplier entre éditeurs et big techs. Ils donneront un avantage concurrentiel démesuré aux géants de la tech capables de payer, face aux autres acteurs (open source par exemple) qui n'en ont pas les moyens. Cela annonce une concentration accrue des pouvoirs de l'IA entre quelques mains. Autre question : seuls les grands éditeurs seront favorisés par ce type d'accords, au détriment des plus petits. Ne faudrait-il pas réinventer le droit d'auteur pour permettre une juste rétribution du plus grand nombre, sans pour autant freiner l'innovation ? » Vous avez quatre heures ! | UN FORMAT À LA LOUPE | | Pour les spéléologues de l'IA générative, ceux qui en visitent les moindres recoins, character.ai est une petite grotte où les âmes se perdent... Pourquoi ? Parce que cette plateforme américaine permet à ses utilisateurs de créer et converser avec un chatbot qui imite la personnalité de leur choix. Stars du grand ou petit écran, personnages historiques ou de fiction, « anything's possible », comme on dit là-bas. « Je parle au personnage de Ryan Gosling sur character.ai jusqu'à trois heures du matin au lieu de dormir » ou « Je suis carrément marié à Drago Malefoy (le grand rival d'Harry Potter, ndlr) », peut-on lire sur X et TikTok, où les témoignages ne manquent pas.
Le Figaro s'est même amusé à en tirer un petit florilège dans cette longue enquête sur cette app lancée en mai 2023 par deux anciens ingénieurs de Google. Un succès fulgurant qui chiffrait à presque deux millions de téléchargements dès la première semaine selon TechCrunch, et cumule aujourd'hui plus de 170 millions d'utilisateurs actifs mensuels. « Personnellement, j'ai commencé à l'utiliser pour apprendre et converser dans des langues étrangères comme l'anglais ou le japonais. Avant, je le faisais sur ChatGPT mais les conversations tournaient en rond, détaille Kureha, une utilisatrice contactée par Le Figaro. Sur character.ai c'est plus divers, je peux échanger avec de nombreux personnages de mangas que j'aime et qui ont différentes personnalités. » En novembre dernier, l'entreprise a même annoncé la possibilité de programmer des voix « préfabriquées et sélectionnées » soigneusement par ses équipes. L'échange se fait alors sous forme de notes vocales comme sur WhatsApp. « Cela rend l'expérience plus agréable. Surtout quand on pratique une langue, ça évite de devoir aller chercher la prononciation sur Google », poursuit Kureha. Le même Google qui, d'après Business Insider, pourrait bientôt injecter 200 millions de dollars dans ce projet – toujours en version bêta – qui donne un bref aperçu de ce que le futur nous réserve. Brrr... Froid dans le dos. | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | « Comment parler des métiers de la pub à des étudiant.es qui ne nous ne connaissent pas, mais qui aimeraient bien faire des choses qui changent les choses ? » Cette question, l'agence Marcel se l'est posée pour trouver ses futurs stagiaires et alternants. Et la réponse, c'est sur BeReal qu'elle l'a trouvée. Grâce à cette application française qui vous donne deux minutes pour publier deux photos prises simultanément à différents moments de la journée via les deux objectifs de votre smartphone, l'agence créative du groupe Publicis poste « une double photo qui projette l'étudiant.e dans son futur univers ». Une scène du quotidien affichée sur l'écran principal qui, accompagnée d'une silhouette comportant la mention « Toi » sur celui correspondant au selfie, donne envie de rejoindre l'équipe dès le premier contact avec le candidat. Et ça marche ! Car l'autre bonne idée, c'est la possibilité de postuler, sans CV, en commentant directement le post. Une idée ludique et efficace pour attirer de nouveaux talents en herbe, tout en soignant sa marque employeur. | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | « Comme une femme sur dix en France, Marion est atteinte d'endométriose. Alimentation, travail, intimité, fécondité... les symptômes affectent tous les aspects de sa vie. Pour apprendre à dompter la douleur, elle affronte un véritable parcours du combattant. » Et pour sensibiliser à cette maladie encore méconnue par les professionnels de santé, la plateforme Spicee propose gratuitement Endométriose : l'ennemie intime, un mini docu de dix minutes réalisé par Camille Bruère et Heather Cerf. Un témoignage fort, émouvant, sur ce mal qui fait vivre l'enfer à environ deux millions de femmes en France et pour lequel il n'existe encore aucun traitement spécifique. |
|