Les Gafa ont les boules Cette semaine, ce n'était pas exactement Noël avant l'heure pour les Gafa : rapport au gouvernement français pour une régulation plus poussée de la publicité numérique (très critique envers le duopole Google-Facebook), menace de démantèlement de Facebook aux États-Unis, amendes sévères infligées par la Cnil à l'encontre de Google et Amazon pour non-respect de la législation sur les cookies... On fait le point sur la fronde des autorités politiques et des instances de régulation, bien décidées à serrer les vis face à des « gatekeepers » à la santé financière insolente, dans un marché très morose. Réguler le marché publicitaire Le duopole Google-Facebook capte aujourd'hui 75 % de la publicité digitale et 90 % de la croissance du secteur. Une situation qui met en danger les médias traditionnels. Aujourd'hui, seuls 6 % des revenus de la publicité digitale en France revient aux médias historiques. Cette mainmise bien connue de tous ne fait que se renforcer, selon le rapport commandé par le ministre de la Culture et le secrétaire d'État au numérique et publié cette semaine : « Publicité en ligne : pour un marché à armes égales ». Dans les grandes lignes, l'étude propose un cadre rénové de régulation des deux grandes plateformes. Selon les auteurs, Quentin Jagorel, Anne Perrot et Mathias Emmerich, les droits voisins pour les éditeurs de contenu ne sont que des solutions « palliatives », « ne traitant que les symptômes de l'asymétrie dans le rapport de force sur le marché en ligne ». Une des pistes abordées pour renforcer la régulation consisterait à « actionner le levier de brand safety », pour contraindre les plateformes à garantir la contextualisation des annonces, ce qui favoriserait les contenus journalistiques. Une amende record pour Google De son côté, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) passe à la vitesse supérieure. Et pas qu'un peu. Cette dernière a administré jeudi 10 décembre des amendes de 100 millions et 35 millions d'euros respectivement à Google et Amazon, pour non-respect de la législation sur les cookies. « L'amende contre Google est la plus importante jamais infligée » par la Cnil, souligne « Le Monde ». Risque de démantèlement pour Facebook Et « what about Facebook » ? La Federal Trade Commission et une coalition de 48 États ont engagé des poursuites antitrust contre Facebook. Ils réclament à la justice la cession par le réseau social des services Whatsapp et Instagram. « Pendant près d'une décennie, Facebook a utilisé son monopole pour écraser ses rivaux, étouffer la concurrence, tout cela au détriment des utilisateurs », analyse la procureure générale de New York, Letitia James. L'Europe dans tout ça ? Et ce n'est pas fini. Les prochains jours s'annoncent déterminants dans le processus de régulation des géants du numérique. La Commission européenne présentera le 15 décembre deux projets de règlement ad hoc : le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA). Comme le souligne le « managing editor tech » chez Axios, Scott Rosenberg, le dénouement s'annonce laborieux : « Parce que le paysage technologique abrite plusieurs géants plus qu'un mastodonte, les régulateurs qui tentent de limiter le pouvoir des entreprises sont confrontés à un défi de taille : il est plus difficile de faire payer un "monopole" à des entreprises qui sont occupées à se concurrencer les unes les autres. » Ce qui rend plus difficile de démontrer que la concurrence a été écrasée et les consommateurs lésés. Certes mais qui ne tente rien... | | UN PAVÉ DANS LA JUNGLE | Hootsuite a publié son cinquième rapport annuel « Social Trends », qui analyse les tendances émergentes dans les médias sociaux. Un rapport fondé sur une enquête menée auprès de 11 189 spécialistes du marketing au troisième trimestre 2020. Ce qui a attiré notre attention ? Ce chiffre glissé mine de rien : plus de 68 % des sondés pensent que le contenu des marques est ennuyeux. Pourquoi c'est un pavé ? « Les marques doivent trouver des moyens créatifs de s'intégrer dans la conversation au lieu d'essayer de la mener, en créant des contenus qui brisent le mur de l'indifférence », préconise le rapport. Le B2B Institute ne dit pas autre chose, comme on l'évoquait dans une de nos newsletters précédentes : il faut adopter la logique de blockbuster : « Si vous ne dépensez pas au moins 50 % de votre budget pour une seule idée créative, vous ne pariez pas assez gros. » Mais plus globalement – et à Story Jungle, c'est notre combat –, il est urgent de mener la guerre contre l'eau tiède. | UN FORMAT À LA LOUPE | | LinkedIn commence à tester des publicités dans ses « stories » aux États-Unis et au Canada. Le test est déployé sur 1 000 campagnes, auprès de 600 annonceurs, dont WeWork, Daimler AG, Cadillac ou encore Axios. LinkedIn prévoit de diffuser largement ces publicités dans les stories en 2021. « La nature visuelle des stories permet d'intéresser les annonceurs tels que les spécialistes du marketing des produits de luxe et les médias qui n'ont pas dépensé beaucoup d'argent pour les publicités auparavant », selon Gyanda Sachdeva, vice-présidente produit pour LinkedIn Marketing Solutions. Depuis le lancement de la fonctionnalité – en septembre aux États-Unis et en octobre dans le monde entier –, LinkedIn a déclaré que les membres et les entreprises avaient publié plus de 3 millions de stories sur la plateforme. À noter que LinkedIn teste également un format publicitaire pour promouvoir les LinkedIn Events. On y reviendra prochainement. | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | Installez-vous sur votre divan et offrez-vous une petite « séance de psy musicale ». Sur « Fanzine », cet Ovni YouTube lancé par les musiciens Waxx et Cole, des artistes de la scène française sont invités à faire des reprises de leurs chansons favorites, et à parler musique. Des performances réalisées en toute décontraction dans un cadre coloré. Gaël Faye évoque ainsi la musique omniprésente lors de son enfance au Burundi (« comme si nos vies avaient une bande originale »), son rapport à la scène (« quand je monte sur scène, je peux approcher le super héros qui est en moi »), son amour de la musique, et propose des reprises sublimes de « Redemption song » de Bob Marley (« une prière intemporelle »), ou encore « Pookie » d'Aya Nakamura (« elle joue avec la langue française, il y a toujours du sens »), réarrangés par les talentueux Waxx et Cole. C'est moderne, très bien produit, décalé, et cela vous donnera certainement des frissons... | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | L'affaire avait provoqué la stupeur, l'arrêt net d'une éventuelle carrière présidentielle et surtout « l'étincelle qui a allumé MeToo ». Neuf ans après les faits, le réalisateur Jalil Lespert – alias « Le Petit Lieutenant » – revient pour Netflix sur l'affaire DSK dans une série de quatre épisodes intitulée « Chambre 2806 ». Que s'est-il passé derrière la porte de la chambre 2806 du Sofitel de New York le 14 mai 2011 ? Il convoque ainsi Nafissatou Diallo, ancienne femme de chambre de l'hôtel, qui revient minutieusement sur les accusations de viol qu'elle porte à l'encontre de Dominique Strauss-Kahn. Des témoignages de journalistes, avocats, policiers et victimes viennent compléter le tableau de cette sordide affaire. Pour Tristane Banon, la première à accuser DSK de tentative de viol et intervenante dans le documentaire fleuve, « beaucoup de choses que l'on voit dans la série ne seraient pas possibles aujourd'hui. Le traitement médiatique réservé aux plaignantes de violences sexuelles a évidemment complètement changé depuis 2011, et c'est tant mieux. Même si le chemin est encore long ». Une série prenante – devenue un des programmes les plus regardés de Netflix France –, servie par une réalisation de qualité. | LE CONTENU QU'ON A AIMÉ FAIRE | Comment réussir à surprendre l'utilisateur de manière positive ? Franck Sebay (EY) y répond avec son invité Jean-Charles Samuelian-Werve, CEO et cofondateur d'Alan, dans le troisième épisode du podcast « Grow Fast, Now What ? », réalisé par nos soins. Où l'on apprend comment concevoir une « feature joyful ». |
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